Des côtes qui s'érodent, des villes qui surchauffent, des réservoirs qui se remplissent et des skis qui restent - peut-être - au placard... L'avenir climatique du Québec se précise avec l'avancement des études sur le climat.

C'est ce qui ressort d'une nouvelle synthèse du consortium de recherche Ouranos, qui regroupe quelque 250 scientifiques québécois. Le rapport, intitulé «Savoir s'adapter aux changements climatiques», fait le point sur la recherche foisonnante sur l'impact des changements climatiques et les possibilités d'adaptation.

 

Peu importe les efforts de réduction de gaz à effet de serre (GES) dans le monde, le Québec de 2050 ou de 2080 sera plus chaud. Dans le Nord, il sera plus humide, mais pas dans le Sud. Et les côtes du golfe Saint-Laurent reculeront plus vite.

Mais il y aura des gagnants au jeu climatique: Hydro-Québec devrait voir ses réservoirs se remplir plus aisément. Le débit des rivières augmentera de 10 à 15% dans la région de la Baie-James et de 7 à 10% à Churchill Falls et sur la Côte-Nord.

Ce phénomène sera couplé à une baisse de la demande énergétique pour le chauffage dans le Sud. Toutes proportions gardées, les surplus d'électricité seront donc en hausse. Dans le Sud, les précipitations seront stables, mais les températures plus élevées assécheront les plans d'eau plus rapidement. Cela pose des défis aux gestionnaires de barrages du sud du Québec, note Ouranos.

Le rapport fait état d'une simulation du niveau du lac Saint-François. C'est l'un des plus grands plans d'eau de l'Estrie, et sa gestion détermine le débit de la rivière Saint-François, qui traverse notamment Sherbrooke et Drummondville.

La simulation montre que «les changements climatiques entraîneraient une modification des agencements et compromis actuels entre les différents usages de l'eau des réservoirs».

Alors que l'avenir de la station de ski du mont Orford est toujours inconnu, l'impact du réchauffement sur le ski alpin est encore incertain, selon Claude Desjarlais, d'Ouranos. «Nous sommes inquiets pour les stations de ski du sud du Québec, dit-il. Mais la dernière saison hivernale, qui peut être représentative du climat futur, n'a pas été si mauvaise parce qu'il n'y a pas eu trop de journées froides; il y a eu de la neige au bon moment et pas trop de pluie.»

Une autre activité sensible au climat, le temps des sucres, sera défavorisée, montre une étude récente. La production baisserait de 15% en 2050 et de 22% en 2090, à cause de printemps plus chauds. Il faudrait que les érables s'adaptent en devançant leur période de montée de sève d'une douzaine de jours en 2050 et de 19 jours en 2080, mais leur capacité d'adaptation est mal connue.

Ces données de plus en plus précises sur les impacts des changements climatiques commencent à avoir un effet sur le terrain, selon Alain Bourque, coordonnateur, impacts et adaptation, à Ouranos.

«Parfois, on est surpris d'apprendre que les gens, comme des assureurs et des investisseurs, utilisent notre information», dit M. Bourque.

«Notre premier rapport, en 2004, a permis d'amorcer et de généraliser la réflexion à une multitude d'usagers et de décideurs, dit-il. En 2010, on a déjà des exemples concrets de gens qui ont pris des décisions d'adaptation. Par exemple, le ministère des Transports et la Ville de Québec ont décidé de revoir le design des ponceaux. Dans le Nord, la planification de l'occupation du territoire en tient compte. Le dernier plan d'action sur les changements climatiques du Québec a inclus la réduction des îlots de chaleur urbains.»