L'Autriche est la championne du compostage de l'Union européenne: elle composte 40% de ses déchets ménagers, près de 2 millions de tonnes chaque année pour une population de 8,3 millions d'habitants, grâce au développement de ses réseaux de tri et de valorisation depuis près de 20 ans.

Ainsi, la petite république alpine dispose actuellement de près de 550 installations afin de valoriser les déchets «dans l'agriculture, dans les communes ou chez les particuliers», explique-t-on à l'Office fédéral de l'Environnement.

Et encore le compostage maison (1,5 million de tonnes par an) n'est pas compris dans les statistiques, rappelle l'Office.

Ces montagnes d'épluchures de légumes, feuilles mortes et autres déchets biodégradables sont collectées dans des bennes spécialisées ou des déchetteries.

La «conscience du tri» alimentant ce système est aiguillonnée par le cadre législatif: séparer les ordures biodégradables est une obligation depuis 1995 pour tous les ménages autrichiens.

Les grandes chaînes de supermarchés y participent à leur manière en vendant des sacs plastiques 100% compostables pour quelque dizaines de centimes d'euro.

Plusieurs grandes communes s'étaient déjà lancées dans l'aventure du compostage dès la fin des années 1980, dont la capitale Vienne. Ses 1,2 million de citoyens trient soigneusement aujourd'hui quelque 90 000 tonnes de déchets, surtout de jardin, pour y être recyclés en 45 000 tonnes de compost par an.

Ce matériau est réutilisé notamment dans les champs et les vignes qui habillent les collines bordant la ville, les espaces verts publics ou est proposé gratuitement aux résidents.

Environ 10 000 autres tonnes permettent de produire du biogaz entrant dans la production de chauffage urbain pour plusieurs centaines de foyers.

Graz, seconde ville du pays au sud-est, fait même mieux avec 87 kg de déchets biodégradables collectés par an et par habitant. Les bons trieurs sont récompensés: «ils réduisent leur facture de ramassage des ordures», indique Ralf de Roja de la société AEVG chargée de la valorisation des déchets.

Les communes, elles, ne font pas leur beurre avec le compostage. «C'est principalement une mesure environnementale», assure Wojciech Rogalski, responsable de la stratégie déchets à la mairie de Vienne. Les déchets seraient sinon incinérés et au-delà des rejets en CO2, «il faudrait aussi traiter les cendres toxiques», explique-t-il.

À regarder les statistiques de près, même champions d'Europe les Autrichiens ont une large marge de progression. À Graz, 43% des déchets biodégradables terminent encore dans la mauvaise benne et ne peuvent être valorisés. Faire mieux «a un coût» que les communes ne veulent pas forcément engager, selon M. de Roja.

À Vienne, il existe de fortes disparités entre les arrondissements périphériques (100 kg/hab/an) et urbains (12 kg/hab/an) où les immeubles ne sont pas dotés de bennes dédiées. Les résidents doivent se déplacer jusqu'aux conteneurs, comme pour le verre, les bouteilles en plastique, les cannettes de boisson et boîtes de conserve.

Au total, le manque à composter avoisine les 200 000 tonnes par an dans la capitale. Pour y remédier, la mairie songe à étendre les pouvoirs de sanction des Waste Watchers instaurés en 2008. Ces brigades créées pour informer sur le recyclage peuvent déjà sanctionner les infractions à la «loi sur la propreté» par des amendes allant de 36 euros à 1 000 euros, selon la gravité des méfaits. L'argent ainsi récolté contribue à financer le nettoyage des rues et parcs publics.