Même en faisant rouler tous les poids lourds du Québec au gaz, la pollution néfaste pour le climat ne serait réduite que de façon marginale, au prix de plus de 4 milliards de crédits d'impôt.

C'est l'avis de Daniel Breton, du mouvement Maître chez nous 21e siècle, qui a présenté un mémoire au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) hier.

M. Breton s'en est pris aux vertus écologiques du gaz dans les transports, une des raisons pour lesquelles il faudrait, selon le gouvernement Charest, lancer l'industrie du gaz de schiste.

« Il y a 71 000 camions lourds au Québec, a dit M. Breton. Même s'ils étaient tous convertis au gaz naturel liquide, les émissions totales du Québec ne diminueraient que de 1,9 %. Et avec un coût de 50 000 $ à 90 000 $ par camion, avec la déduction d'impôt accélérée prévue dans le dernier budget, on parle de 4,5 milliards de déductions. C'est beaucoup d'argent pour peu de réduction de gaz à effet de serre. «

Et c'est sans compter un facteur important : les réservoirs de gaz naturel liquide installés sur les camions comportent une valve qui laisse constamment échapper un peu de produit. Ce gaz, le méthane, a un impact 25 fois plus grand sur le climat que le gaz carbonique qui est émis pendant la combustion.

M. Breton remet aussi en doute la capacité du gaz naturel de remplacer le mazout, ce qui permettrait de réduire d'environ 2 % les émissions québécoises de GES.

« Parmi les 25 questions que nous avons posées au BAPE, nous avons demandé un document sur les résultats du programme actuel de substitution des hydrocarbures depuis les trois dernières années. On n'a pas eu cette information. «

Le gaz ennemi de l'hydroélectricité?

M. Breton a aussi demandé, sans l'obtenir, un avis officiel sur l'impact du gaz de schiste sur les exportations d'hydroélectricité. En effet, plus le prix du gaz diminue, moins l'électricité coûte cher à produire aux États-Unis et moins les exportations d'Hydro-Québec sont rentables.

Cette préoccupation a trouvé écho dans le témoignage de la CSN hier. « Si on exporte notre gaz, on fait diminuer le prix de l'électricité, a dit Roger Valois, de la CSN. On appelle ça tirer dans notre chaloupe. « La CSN demande aussi un moratoire sur l'industrie, comme presque tous les intervenants qui ont témoigné devant le BAPE.

Transparence de façade

De son côté, le Centre québécois en droit de l'environnement (CQDE s'est montré très sévère à l'égard du ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs (MDDEP).

Deux entreprises, Gastem et Talisman, sont intervenues auprès du Ministère pour bloquer l'accès aux renseignements sur les produits chimiques employés dans deux opérations de fracturation.

« L'industrie nous tient un grand discours sur la transparence, mais quand vient le temps pour des citoyens ou des groupes d'obtenir cette information, on nous la refuse, dit Me Jean Baril, du CQDE. Le Ministère aurait dû dire aux entreprises : «Je suis forcé par la loi de donner cette information.» «

Me Mario Denis, du CQDE, qui vient de prendre sa retraite après 18 ans au contentieux du MDDEP, estime que ce refus témoigne d'un « manque flagrant de prudence et d'une violation du principe de précaution «.