Alors que les pays de la planète sont réunis à Cancun pour discuter d'une stratégie mondiale de lutte aux changements climatiques, un rapport publié mardi révèle que le gouvernement canadien, lui, n'a toujours pas de plan national pour s'adapter et manque de leadership en la matière.

Même si Ottawa s'y est engagé à plusieurs reprises, le gouvernement n'a pas encore mis en oeuvre de stratégie fédérale d'adaptation aux changements climatiques, déplore le rapport automnal du commissaire à l'environnement, Scott Vaughan.

Selon le commissaire, dont l'étude a été déposée aux Communes mardi matin, l'absence de plan d'action du gouvernement «a nui aux efforts des ministères pour coordonner leurs actions afin de faire face aux effets des changements climatiques».

Son constat quant à la réponse du gouvernement aux changements climatiques est sombre, dénotant un manque de leadership persistant et une information inadéquate sur le sujet.

«Ce n'est pas un manque de leadership d'hier, ce n'est pas un manque de leadership d'aujourd'hui; il y a un manque de leadership depuis 20 à 25 ans et c'est la raison pour laquelle aujourd'hui, maintenant, (...) il y a des problèmes sans précédent, des menaces environnementales qui sont sans précédent», a noté M. Vaughan, en conférence de presse pour présenter son rapport.

L'étude - qui s'est penchée sur les ministères de l'Environnement, des Ressources naturelles, de la Santé, des Pêches et Océans ainsi que des Affaires indiennes - indique que plusieurs ont évalué les impacts des changements climatiques, mais ont entrepris peu de mesures pour y répondre.

Faute d'«orientation stratégique centrale», les ministères agissent indépendamment les uns des autres et le gouvernement n'a pas établi de priorités auxquelles ceux-ci peuvent se fier. Pourtant, «pratiquement tous les portefeuilles du gouvernement sont touchés», dénote le rapport.

D'autant plus que les effets des changements climatiques se font déjà sentir, a souligné M. Vaughan en citant au passage la sécheresse subie en Saskatchewan dans les dernières années ou la fonte du pergélisol dans le Nord.

De manière générale, le commissaire dénonce que le fédéral est incapable de recueillir l'information nécessaire pour gérer les enjeux environnementaux critiques.

«Gérer l'environnement au Canada sans information scientifiquement rigoureuse sur l'environnement revient à tenter de diriger l'économie canadienne sans disposer d'indicateurs», illustre-t-il dans son rapport.

Ainsi, la Garde côtière n'a pas mené d'évaluation nationale des risques de déversements de pétrole au large des côtes canadiennes depuis 10 ans.

L'agence fédérale n'a pas de système pour recueillir l'information et celle-ci n'est donc pas à jour, tout comme les plans de gestion des urgences de la Garde côtière. L'agence ne peut donc pas déterminer la quantité d'équipement d'intervention nécessaire à certains endroits, par exemple.

Et si le ministère des Transports vérifie l'état de préparation du secteur privé, personne ne vérifie si c'est le cas du côté de la Garde côtière.

Là encore, un comité d'examen public avait recommandé, il y a 20 ans, que le gouvernement mette en place un régime national de réponse aux déversements de produits chimiques provenant de navires. Mais la recommandation n'a pas eu de suite.

M. Vaughan souligne enfin qu'en matière de surveillance de la quantité et la qualité de l'eau au pays, Environnement Canada n'a pas défini ses responsabilités, en particulier sur les terres qui relèvent du fédéral, comme les réserves des autochtones, les bases de l'armée canadienne et les parcs ou réserves nationales.

Les stations de surveillance n'ont pas été réparties en fonction d'une évaluation sur le sujet, ce qui fait que les efforts de surveillance ne sont peut-être pas effectués là où les risques sont les plus importants, selon le commissaire.

Les cinq ministères évalués par le commissaire ont tous accepté ses recommandations.

Mais de l'avis de l'opposition, le rapport de M. Vaughan témoigne du manque de sérieux des conservateurs en matière d'environnement.

«Non seulement le gouvernement n'a pas de projet, ne sait pas où il va sur le plan international dans la lutte contre les changements climatiques, mais il ne se soucie aucunement des impacts des changements climatiques ici au Canada», a argué le libéral Francis Scarpaleggia.

Une opinion partagée par le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique (NPD), qui ont tous deux accusé le gouvernement, aux Communes, d'arriver à la table de discussions à Cancun les mains vides et de défendre les pétrolières plutôt que de combattre les changements climatiques.

«C'est foutaise et balivernes; ils n'ont pas la moindre intention de mettre en place un plan. Ils ne l'ont jamais fait, ils ne le feront jamais», a scandé le chef adjoint du NPD, Thomas Mulcair.

Le ministre de l'Environnement, John Baird, a cependant indiqué, par voie de communiqué, que son gouvernement prenait les mesures nécessaires pour mener ses priorités environnementales.

«Nous sommes résolus à collaborer avec nos partenaires afin de prévenir les urgences environnementales en milieu marin et de s'y préparer. Des travaux sont déjà en cours en vue de donner suite à de nombreuses recommandations formulées dans le rapport», a assuré le ministre dans un communiqué envoyé alors qu'il se dirigeait vers la Conférence des Nations unies sur le climat, à Cancun au Mexique.