La très forte mortalité des abeilles, particulièrement dans les pays industrialisés de l'hémisphère nord, alarme l'ONU. Cette hécatombe pourrait avoir de graves conséquences sur la production alimentaire en raison du rôle que jouent les abeilles dans la pollinisation, selon un rapport du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) publié jeudi.



«Des 100 espèces végétales qui fournissent 90% de la nourriture dans le monde, plus de 70 sont fécondées grâce aux abeilles», a indiqué Achim Steiner, directeur général du PNUE, en conférence de presse à Genève. En Amérique du Nord, les pertes de colonies sont si importantes qu'il y a maintenant moins de pollinisateurs que jamais depuis 50 ans.

Une douzaine de facteurs expliquent ces pertes croissantes, d'après l'ONU, notamment la dégradation des habitats naturels, les parasites, la pollution, les herbicides, les pesticides et le transport de colonies d'abeilles pour la pollinisation.

Le Québec n'est pas épargné: les pertes totales de colonies ont atteint 27% au printemps 2010, selon le bulletin L'abeille électronique de la Fédération des apiculteurs du Québec. «Environ 40% des produits alimentaires contenus dans notre assiette au Québec provient indirectement ou directement du travail des abeilles par la pollinisation», souligne la Fédération dans son site internet.

Un canari dans la mine

«L'abeille est un bio-indicateur: une fois qu'elle est touchée, ça démontre qu'il y a une fragilisation de l'ordre naturel des choses», a dit à La Presse Anicet Desrochers, producteur des Miels d'Anicet.

«L'abeille est comme une sentinelle de l'environnement, un canari dans la mine», corrobore Claude Boucher, vétérinaire responsable du réseau sentinelle apicole du ministère de l'Agriculture (MAPAQ). Mais il est difficile de résoudre le mystère de son déclin. «Il n'y a rien de tranché, de blanc ou noir, nous sommes dans une grande zone grise», a-t-il indiqué.

Des analyses réalisées par le MAPAQ depuis 2008 ont toutefois permis d'élucider quelques pertes. À Sainte-Martine, en Montérégie, un apiculteur a trouvé plus de 200 colonies mortes en mai 2009, juste après que du maïs eut été semé sur un terrain avoisinant. On a trouvé dans les abeilles des résidus de pesticides utilisés pour traiter les semences, qui ont fort probablement causé leur mort, selon un rapport d'incident publié par Santé Canada.

On a détecté les mêmes pesticides dans des abeilles mortes à Coteau-du-Lac et à Saint-Dominique, en mai 2010. Des abeilles témoins, recueillies ailleurs dans la production de Coteau-du-Lac, ne contenaient aucun pesticide.

Malgré tout, l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) a conclu qu'«aucune autre mesure réglementaire n'est requise de Santé Canada en ce moment». Ces incidents seront toutefois considérés au moment d'accorder une homologation complète aux pesticides en question, la clothianidine et le thiaméthoxame. Leur homologation est actuellement conditionnelle.

Un autre pesticide tueur d'abeilles, le diazinon, est en voie d'être éliminé. C'est en raison de «risques pour la santé humaine, pour l'environnement», ou «parce que les titulaires de son homologation n'appuient pas le maintien de son homologation» que ce pesticide a été réévalué par l'ARLA. Du diazinon avait été trouvé dans des abeilles mortes à Notre-Dame-de-Lourdes, en août 2010.

- Avec l'AFP