Alors que l'opposition à l'atome s'est renforcée en Italie depuis les accidents au Japon, le gouvernement de Silvio Berlusconi a donné mardi un coup d'arrêt à son programme de retour au nucléaire et annoncé «une nouvelle stratégie énergétique» pour une date non précisée.

Le gouvernement a «présenté aujourd'hui un amendement au décret-loi 34 actuellement à l'examen du Sénat», qui «prévoit l'abrogation des normes concernant le programme de localisation, de réalisation et d'activité sur le territoire national de centrales nucléaires», selon un communiqué officiel.

Si cet amendement est adopté, ce qui fait peu de doute étant donné la majorité dont dispose Silvio Berlusconi au parlement, le gouvernement devra s'atteler à la «définition d'une nouvelle stratégie énergétique nationale» qui «tiendra compte des indications définies par l'Union Européenne et les organismes nationaux compétents», selon le communiqué.

Selon le ministre du Développement économique Paolo Romani, la nouvelle stratégie qui devra «porter sur les 20 prochaines années», commencera à être définie «après l'été».

«Il est important de se tourner vers l'avenir et d'utiliser les meilleures technologies disponibles pour la production d'énergie propre, particulièrement dans le domaine des énergies renouvelables et de l'énergie verte», a-t-il précisé.

Des conseillers gouvernementaux ont estimé que cela n'excluait pas complètement le nucléaire de l'horizon italien. Mais pour le ministre de la Simplification réglementaire Roberto Calderoli, cela revient à un abandon de l'atome «au jour d'aujourd'hui».

Le Cavaliere semble donc avoir décidé d'enterrer l'un de ses projets phares annoncé dès son retour au pouvoir en 2008 pour réduire la dépendance énergétique de l'Italie et faire baisser le prix de l'électricité.

Après le séisme du 11 mars au Japon et les accidents nucléaires dans la centrale de Fukushima, le gouvernement avait d'abord décidé le 23 mars un moratoire d'un an sur le processus de retour au nucléaire en attendant les tests de résistance sur les centrales nucléaires européennes et pour réfléchir à la sécurité alors que l'Italie est un pays sismique.

La semaine dernière Silvio Berlusconi avait envisagé de le porter à deux ans car «une année ne sera pas suffisante pour rassurer les Italiens».

Certains membres de l'opposition se sont demandé si l'abrogation du programme n'était pas un moyen pour le gouvernement d'éviter la tenue d'un référendum sur le nucléaire les 12 et 13 juin en supprimant sa raison d'être avant de reproposer la construction de centrales dans un an.

Cet amendement est «l'énième arnaque du gouvernement», a jugé Antonio Di Pietro, leader du parti d'opposition Italie des Valeurs, en exigeant un amendement qui dise définitivement non au nucléaire. Selon lui, M. Berlusconi espère ainsi décourager l'affluence aux urnes les mêmes jours à deux autres referendums, dont un contre une loi lui accordant une immunité pénale partielle.

C'est un «maquillage» pour «gagner du temps, éviter que les Italiens s'expriment à travers le référendum et proposer à nouveau le nucléaire dans un an», a renchéri le directeur de Greenpeace Italie, Giuseppe Onufrio.

La crise nucléaire au Japon a renforcé l'opposition déjà très marquée à l'atome en Italie, où le nucléaire avait déjà été abandonné en 1987 par référendum après la catastrophe de Tchernobyl.

Rome s'était fixé pour objectif de produire d'ici à 2030 25% de ses besoins en électricité grâce au nucléaire.

L'Italie devait démarrer la construction des centrales en 2014 pour une mise en service en 2020. Le français EDF (Électricité de France) et l'italien Enel s'étaient alliés en 2009 pour construire quatre réacteurs EPR italiens.

Le patron d'Enel Fulvio Conti interrogé après le moratoire de mars avait indiqué qu'en cas d'abandon de l'atome, Enel ferait «plus de charbon et de renouvelables».