Les oiseaux et les papillons européens s'adaptent au réchauffement climatique en remontant vers le nord, mais pas suffisamment vite pour compenser l'augmentation des températures moyennes, démontre pour la première fois une étude publiée dimanche.

Une étude similaire, publiée également dimanche par la revue britannique Nature Climate Change, relève en outre que le réchauffement est en train d'altérer profondément la végétation alpine sur tout le continent.

En une vingtaine d'années (1990-2008), les températures moyennes ont augmenté en Europe d'environ 1°C, ce qui revient à un décalage des températures vers le nord équivalent à 249 kilomètres, souligne l'étude menée par le biologiste français Vincent Devictor du CNRS de Montpellier.

Régime alimentaire, stratégies migratoires, types d'habitats et autres spécialisations écologiques sont souvent très dépendants du climat, et le réchauffement en cours a un impact notable sur de nombreuses populations animales.

La réponse des papillons à ce changement climatique a été un glissement vers le nord également, mais avec un retard accumulé sur cette période de près de 135 km sur les températures.

Un retard encore plus marqué pour les oiseaux, avec un décalage de 212 km, relève dans un communiqué le Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN) de Paris, pour lequel Frédéric Jiguet a coordonné l'étude sur les oiseaux.

Pour le Muséum, cela «illustre à quel point les changements climatiques réorganisent rapidement et profondément la composition de la faune en Europe, avec d'inquiétants décalages dans la réponse des différents groupes d'espèces» qui pourraient profondément modifier les interactions entre ces espèces.

La flore s'adapte moins vite

Fruit d'une collaboration sans précédent entre de nombreux chercheurs européens, cette étude a observé l'impact du changement climatique sur 9490 communautés d'oiseaux et 2130 communautés de papillons dans différents pays (France, Royaume-Uni, Espagne, Pays-Bas, Suède, Finlande et République tchèque).

Ces chercheurs ont bénéficié des données récoltées par des milliers de naturalistes bénévoles de différents réseaux, totalisant plus d'un million et demi d'heures passées sur le terrain depuis plus de vingt ans pour compter papillons et oiseaux, souligne le MNHN.

Une tendance similaire apparaît pour la flore alpine, qui n'est toutefois pas en mesure de s'adapter aussi bien et vite que les animaux, selon une étude dirigée par l'Académie des Sciences autrichienne et l'Université de Vienne.

Une équipe de botanistes de 13 pays ont analysé 867 échantillons de végétation provenant de 60 grands sommets européens, d'abord en 2001 puis en 2008.

La comparaison des résultats suggère que, à l'échelle du continent tout entier, les plantes traditionnelles des climats alpins froids sont en train d'être évincées par des plantes adaptées aux régions plus chaudes.

«Nous nous attendions à trouver un nombre plus important de plantes aimant la chaleur à des altitudes plus élevées, mais pas à découvrir un changement aussi marqué dans un laps de temps si court», explique dans un communiqué Michael Gottfried, du programme GLORIA qui a coordonné l'étude.

«De nombreuses espèces adaptées au froid sont littéralement en train de déserter les montagnes. Dans certains sommets de basse montagne européens, on pourrait voir disparaître dans les prochaines décennies les prairies alpines au profit d'arbustes nains», met-il en garde.