La conférence de Poznan sur le climat s'est terminée la nuit dernière à Poznan sous les huées des groupes écologistes et des pays en développement, qui déplorent le peu de considération qu'accordent les pays riches aux victimes des changements climatiques.

Un peu avant 3h du matin (heure locale), les 189 pays présents en Pologne ont trouvé un terrain d'entente. Ils ont adopté une déclaration commune qui fait passer à la vitesse supérieure les pourparlers devant mener l'an prochain à l'élaboration d'un traité de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui succédera au protocole de Kyoto en 2012.

 

Cet accord laisse cependant un goût amer aux pays en développement qui, comme le Gabon, le Brésil, la Colombie et le Pakistan, par exemple, ont décrié avec vive émotion l'insuffisance des fonds accordés par les pays riches pour les aider à s'adapter aux impacts des changements climatiques.

Les pays du Nord ont refusé que soit prélevée une taxe supplémentaire sur les projets verts qu'ils conçoivent dans le but de bonifier le «fonds d'adaptation», un mécanisme du protocole de Kyoto qui vise à atténuer les effets des inondations, des sécheresses, de la montée des eaux, etc.

Tasneen Essop, de la section sud-africaine du World Wildlife Fund, a déploré que les pays riches, responsables historiques de l'augmentation des gaz à effet de serre, soient si chiches avec les pays en développement, premières victimes du réchauffement de planète.

«C'est une immense déception pour les gens de la société civile, a-t-elle lâché. Alors que les pays en développement ont agi en leaders au cours de la conférence, les pays industrialisés n'ont pas su en faire autant.»

Timidité

Les pays en développement n'ont pas été les seuls à réclamer aux pays riches plus de gestes concrets. Les groupes environnementaux aussi ont décrié leur manque de volonté et souligné la timidité de la déclaration finale.

«Nous sommes profondément déçus en raison du peu de progrès qui a été accompli ici, a indiqué Stephanie Turnmore, de Greenpeace International. Quatre pays, toujours les mêmes, sont responsables de cette situation, soit l'Australie, le Canada, le Japon et la Nouvelle-Zélande.»

«Si les négociations se poursuivent à cette vitesse, il n'y aura tout simplement pas d'entente à Copenhague (en décembre prochain)», a-t-elle ajouté.

La réaction des écologistes est liée aux multiples blocages de ces pays, particulièrement le Canada, qui a mérité pour la deuxième année consécutive le «Fossile de l'année», une contre-récompense accordée par le Réseau action climat, une coalition de 365 organismes non gouvernementaux de partout dans le monde.

On reproche trois choses au pays: d'avoir une cible de réduction des émissions peu ambitieuse, d'avoir bloqué la proposition visant à utiliser une fourchette de réduction comprise entre 25 et 40%, et enfin d'avoir rayé les mots «droits» et «peuples autochtones» de la déclaration.

Par ailleurs, l'ancien vice-président américain Al Gore a lui aussi demandé aux pays riches de prendre leurs responsabilités et de s'attaquer aux changements climatiques avec plus d'ambition. «Yes we can!» a-t-il répété hier, lors d'un discours chaudement applaudi.

L'Union européenne, galvanisée par l'entente arrachée hier à Bruxelles par les 27 pays qui la composent, en a remis elle aussi, quelques heures plus tard, en demandant aux pays industrialisés de suivre son exemple.

L'Europe vise maintenant un objectif en trois parties: d'ici à 2020, 20% de réduction des émissions (30% s'il y a une entente à Copenhague), 20% d'énergies renouvelables et 20% d'amélioration de l'efficacité énergétique.

Ces règles, «les plus contraignantes au monde», selon le président français, Nicolas Sarkozy, ont fait bondir de joie le commissaire européen chargé de l'environnement, Stavros Dimas. Il a lancé un appel aux pays riches, qu'il a exhortés à faire «des efforts comparables» à l'Europe.

Malgré les fortes pressions subies tout le long de la conférence, le gouvernement Harper a pour sa part fermé la porte à une modification de sa cible de réduction des émissions à l'horizon 2020.

Lors d'une entrevue accordée à La Presse, le ministre de l'Environnement, Jim Prentice, a indiqué qu'il continuera à viser une réduction équivalente à 3% sous le niveau de 1990, même si l'Europe et les États-Unis décident de bonifier leur propre cible.

«Ce sont nos cibles et elles continueront d'être les cibles canadiennes», a-t-il indiqué.