Le rapport du BAPE sur les gaz de schiste ayant été remis au gouvernement lundi, il n'y a plus de raison de tergiverser, disent en choeur l'opposition péquiste et Québec solidaire.

Québec doit donc cesser de chercher à gagner du temps et annoncer sans attendre un moratoire sur l'exploration des gaz de schiste, disent les partis d'opposition.

Car la précaution la plus élémentaire exige que l'on arrête dès maintenant toute exploration des gaz de schiste au Québec, selon le porte-parole de l'opposition péquiste en matière environnementale, Scott McKay.

Mais pour l'instant, aucune date de publication du rapport tant attendu n'a été fixée, ni aucune activité de presse prévue.

Le ministre du Développement durable, Pierre Arcand, entend donc résister aux pressions et refuser de se fixer une échéance. Et il ne fera aucun commentaire sur le rapport tant qu'il ne le rendra pas public, a fait savoir son cabinet lundi.

Le ministre a décliné une demande d'entrevue.

Selon la loi, M. Arcand dispose de 60 jours pour rendre public le rapport. Il n'a pris aucun engagement dans le sens de devancer cette date, tout en disant vouloir procéder rapidement.

Pendant ce temps, la mobilisation citoyenne contre les gaz de schiste, elle, ne fléchit pas, ce qui accentuera la pression sur Québec pour agir promptement, selon le député McKay.

Il fait valoir, en entretien téléphonique, que tous les jours de nouveaux arguments s'ajoutent en faveur de l'imposition d'un moratoire. Il cite un dossier paru dans l'édition de dimanche du New York Times, révélant que les déchets produits par la fracturation de la roche contenant des gaz de schiste laissaient s'échapper des éléments radioactifs dangereux.

«Il n'y a rien là-dedans pour nous rassurer», conclut le député, en notant que cet aspect du dossier n'avait jamais été examiné par le ministère québécois du Développement durable et de l'Environnement.

«Jamais le ministère n'a jugé bon de faire mesurer les isotopes radioactifs dans les eaux de fracturation des gaz de schiste. Cela ressemble beaucoup à de l'aveuglement volontaire», selon lui.

Il estime que cela démontre, si nécessaire, à quel point le gouvernement s'est jeté dans ce projet «tête baissée», sans jamais évaluer les conséquences.

L'enquête du quotidien new-yorkais s'appuie sur des milliers de documents produits notamment par l'agence des États-Unis chargée de la protection de l'environnement (EPA), qui concluent que les dangers de l'exploitation de ces gaz sur la santé et l'environnement paraissent plus importants que prévu.

Le quotidien rapporte que l'eau contaminée à la suite de la fracturation de la pierre est rejetée dans les rivières sans avoir été correctement traitée, même s'il s'agit de sources d'eau potable. Cette eau charrie de la radioactivité à un niveau plus élevé que ce qu'on croyait antérieurement et à un niveau beaucoup plus élevé que celui autorisé par les autorités fédérales, révèle en substance le reportage.

«Chaque jour, ou presque, nous recevons de nouvelles informations par rapport aux gaz de schiste qui sont de nature plutôt préoccupante», ajoute le député, en appui à sa thèse.

De son côté, Québec solidaire dit que le gouvernement doit faire preuve de transparence en rendant public le rapport du BAPE dès maintenant.

«Je trouve désolant que le cabinet du ministre Arcand ait évoqué la possibilité de ne pas s'engager à rendre public le rapport dès cette semaine sous prétexte de prendre le temps de l'analyser. Rien n'empêche le gouvernement de l'analyser même s'il est rendu public», a plaidé par voie de communiqué la porte-parole de Québec solidaire, Françoise David.

Rappelons qu'à la fin du mois d'août, alors que les manifestations de colère de citoyens inquiets se multipliaient, le ministre Arcand annonçait qu'il demandait au BAPE de lui soumettre des recommandations dans ce dossier très controversé.

Le BAPE n'a pas reçu le mandat de se prononcer sur le fond, soit pour ou contre l'exploration et l'exploitation des gaz de schiste au Québec. Son mandat, plus pointu, ne vise en fait qu'à circonscrire la meilleure façon «d'encadrer» le développement de cette industrie, dans le respect de l'environnement.