À l'échelle nord-américaine, le plus important problème environnemental est sans doute la dépendance au charbon. Quasi absent du Québec, le charbon forme toujours la base de l'économie des États-Unis en produisant la majeure partie de son électricité. À un prix imbattable, mais avec des conséquences désastreuses.

Pour la stabilité du climat: le charbon est très riche en carbone et émet beaucoup de gaz carbonique.

Pour la qualité de l'air: même à Montréal, le smog estival est en grande partie dû à la pollution du Midwest.

Pour nos forêts: les pluies acides, dont l'impact est moins grand mais toujours présent, sont causées surtout par les émanations d'oxyde d'azote des plus vieilles centrales thermiques au charbon.

Pour la préservation des écosystèmes dans les Appalaches, où les mines de charbon à ciel ouvert par «raclage de montagne» dévastent des milliers de kilomètres de cours d'eau. Et pour la santé humaine, touchée par la pollution au mercure que crachent les centrales thermiques.

Plusieurs voient le gaz naturel, y compris le gaz de schiste, comme la seule solution de rechange au charbon. Un nouveau rapport du Massachusetts Institute of Technology (MIT) va dans ce sens.

Réduction des GES

«À l'avenir, le gaz non conventionnel, et en particulier le gaz de schiste, fera une contribution importante à l'approvisionnement énergétique des États-Unis et aux efforts de réduction d'émission de gaz carbonique (CO2)», affirme le rapport, fruit du travail de certaines des plus grandes sommités en matière d'énergie aux États-Unis.

Notons cependant que le groupe de recherche sur l'énergie du MIT est dirigé par Melanie Kenderdine, qui est issue de l'industrie gazière.

Le gaz, souligne le rapport, émet moins de carbone dans l'atmosphère, à condition de circonscrire les fuites. À cet égard, il enjoint au gouvernement américain de déterminer une fois pour toutes quel est l'impact de ces fuites.

«C'est un sujet qu'on ne doit pas prendre à la légère, dit Patrick Bonin, de l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA). On doit limiter à 2 degrés le réchauffement climatique et le Programme des Nations unies pour l'environnement a défini la lutte contre les émissions fugitives de gaz naturel comme un moyen prioritaire à court terme pour prévenir des changements climatiques catastrophiques.»

Par ailleurs, le gaz n'émet à peu près pas d'oxyde d'azote, sauf pour la pollution de la machinerie de forage et de fracturation fonctionnant au diesel. Et il n'y a aucun mercure dans le gaz.

Risques pour l'eau

Restent les effets locaux sur l'eau, qui ont retenu l'attention tant au Québec qu'aux États-Unis. Pour le MIT, ce sont des risques contrôlables et les dommages, rares, ont été la conséquence de malfaçons dans les puits.

«Les impacts environnementaux du gaz de schiste posent un défi mais sont gérables, affirme le rapport. L'exploitation exige la fracturation du schiste sur une grande échelle. On s'est inquiété que ces fractures ne pénètrent dans les couches peu profondes contenant l'eau douce et les contamine avec les fluides de fracturation, mais il n'y a pas d'indication que cela se produit. Il y a eu des cas de migration de gaz dans certaines régions, ce qui serait dû selon toute probabilité à des puits mal construits.»

Meilleure option

Ailleurs dans ce même rapport, on apprend que les États-Unis pourraient du jour au lendemain réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) de 8%, ce qui est énorme, simplement en faisant tourner à leur pleine capacité les centrales thermiques au gaz du pays et réduire d'autant l'utilisation des centrales au charbon.

Le charbon est depuis longtemps l'ennemi écologique numéro un aux États-Unis, pour certains groupes prestigieux comme le Natural Resources Defense Council, où travaille entre autres Robert F. Kennedy Jr.

Et le NRDC a longtemps vu l'industrie gazière comme une alliée dans son combat contre le «roi charbon». Le ressac anti-gaz de schiste a mis ce groupe écologiste dans une position délicate. «Nous sommes bien conscients que, si elle est mal faite, l'exploitation du gaz de schiste peut avoir des impacts négatifs sur l'environnement, dit Robin Roy, du NRDC. Mais le gaz naturel a un rôle important à jouer dans une transition vers une économie plus verte.»

«Mais il faudra admettre qu'il y a des endroits où même les meilleures pratiques seront insuffisantes, qu'il y a des endroits où on ne devrait tout simplement pas l'exploiter», ajoute-t-il.

C'est un peu la question que les Québécois se posent actuellement, en y répondant surtout par la négative. Et, évidemment, les termes du débat sont très différents ici.

«On est dans un système énergétique intégré avec les États-Unis, que ce soit dans l'électricité ou le gaz, dit Patrick Bonin. Mais il n'y a aucune logique à exploiter le gaz de schiste au Québec pour l'envoyer dans des centrales aux États-Unis. La contribution du Québec dans le domaine des énergies vertes sur le continent, c'est dans la production hydroélectrique existante et le potentiel éolien.»