Un projet de forage gazier de la société Gastem suscite une forte opposition chez une partie de la population des Îles-de-la-Madeleine, qui craint pour ses fragiles ressources en eau advenant un accident.

Mardi soir, une semaine avant que le promoteur n'explique son projet en assemblée publique, un groupe d'opposants a déposé au conseil municipal plus de 1200 lettres de résidants signifiant à Gastem qu'ils lui refusaient l'accès à leur propriété.

«On est vraiment prêts à la désobéissance civile, affirme Annie Landry, l'une des meneuses de cette opposition. Dès qu'ils commencent, on commence nous aussi.»

La semaine prochaine, son groupe, Énergie alternative, va déposer ces mêmes lettres de refus à l'Assemblée nationale en même temps qu'une pétition. «On demande au ministre des Ressources naturelles et de la Faune, Clément Gignac, de ne pas remettre de permis d'exploration avant la tenue d'une étude du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement sur le projet, dit Mme Landry. On fait la démonstration qu'il n'y a pas d'acceptabilité sociale pour le projet.»

«Il y a beaucoup de questions sans réponse et ce n'est pas à nous de fournir l'expertise technique à la population», dit-elle.

Selon David Vincent, directeur des relations avec les investisseurs et le public chez Gastem, la société n'a pas encore choisi son lieu de forage et, par conséquent, n'a pas demandé de permis.

«On a fait faire une étude de protection de la nappe phréatique, il faut aussi respecter la réglementation municipale et s'entendre avec un propriétaire de surface, dit-il. Ensuite, on peut demander un permis.»

«Le mouvement de refus d'accès, on le respecte, la loi nous impose de négocier de gré à gré avec les propriétaires, dit-il. On n'a jamais eu de problème par le passé. On prend ça comme une manifestation d'inquiétude et on va y répondre en donnant de l'information.»

Le projet de Gastem est de forer un puits d'exploration pour du gaz naturel conventionnel, explique M. Vincent. «Les Îles ont une géologie propice pour des gisements de gaz naturel», dit-il.

Il affirme que le potentiel gazier des Îles est suffisant pour répondre à la demande sur place, mais pas pour justifier une exportation. «Le potentiel serait autour de 80 bcf (milliards de pieds cubes) et les Îles ont un potentiel de consommation de 2 bcf par année», dit-il. M. Vincent ajoute qu'il ne faudrait pas un grand nombre de puits pour suffire aux besoins locaux.

Dans ses présentations, à pleines pages de publicité et sur le site web lesilesaunaturel.com, la société parle des avantages de remplacer le mazout actuellement utilisé dans le chauffage et la production d'électricité.

Mme Landry rétorque en dénonçant le retrait de l'État du secteur des hydrocarbures au profit du privé. «Je ne peux pas concevoir que ç'a été dénationalisé et qu'ils vont venir forer pour nous revendre ce qui nous appartenait», dit-elle.

De son côté, la municipalité des Îles souhaite que le débat aille de l'avant. «On accueille d'un oeil favorable le fait que le promoteur vienne la semaine prochaine exposer son projet en assemblée publique, dit le maire Joël Arseneau. C'est là qu'on verra s'il y a une menace, mais peut-être aussi s'il y a quelque chose d'intéressant sur le plan économique et énergétique.

«On dit: plutôt que de mettre un holà, plongeons dans le débat. Est-ce que c'est dangereux pour la nappe phréatique? Ça dépend où se fera le forage. On ne le sait pas pour l'instant, on va l'apprendre la semaine prochaine.»