Le gouvernement Harper se dissocie d'un document confidentiel, rendu public jeudi par Greenpeace, qui qualifie les écologistes et les autochtones d'«adversaires» dans la campagne d'Ottawa pour promouvoir les sables bitumineux.

Les deux groupes sont ainsi présentés dans document qui détaille la stratégie du gouvernement fédéral pour promouvoir cette ressource controversée en Europe.

«Les sables bitumineux se sont trouvés au coeur de plusieurs campagnes d'organismes non-gouvernementaux en Europe, qui mettent en évidence leurs impacts environnementaux et sociaux (en particulier les dossiers autochtones), ce qui présente le dossier de manière fortement négative», peut-on lire dans la présentation, obtenue par Greenpeace par le biais de la loi sur l'accès à l'information.

Pour redorer l'image de cette ressource, lit-on, Ottawa mise sur des «alliés» des deux côtés de l'Atlantique. Parmi ceux-ci, on compte les sociétés énergétiques, des associations industrielles, l'Alberta et l'Office national de l'énergie, un organisme de consultation non-partisan.

En Europe, la liste des «adversaires» comprend des organismes non-gouvernementaux, certains médias et des industries concurrentes comme celle du biodiesel. Au Canada, cette catégorie comprend deux groupes: les écologistes et les groupes autochtones.

Keith Stewart, de Greenpeace, y voit la preuve que le gouvernement Harper et l'industrie pétrolière mènent une «campagne orchestrée» contre ceux qui s'opposent au développement des sables bitumineux.

«Ce gouvernement est très agressif dans son soutien à l'industrie pétrolière et aux sables bitumineux, dit Keith Stewart, de Greenpeace. Il n'y a aucune mention dans ces documents de stratégies pour améliorer la performance environnementale des sables bitumineux.»

Le gouvernement se dissocie

Au bureau du ministre du Commerce international, Ed Fast, on précise que le gouvernement «n'est pas en accord avec ces caractérisations».

«Nous continuions de travailler en collaboration avec les Premières Nations du Canada pour promouvoir nos intérêts énergétiques, indique le porte-parole du ministre Fast, Adam Taylor. Et l'Office national de l'énergie est une agence fédérale indépendante.»

M. Taylor souligne en revanche que les sables bitumineux constituent une ressource stratégique qui crée des emplois et des opportunités économiques pour les Canadiens, y compris les autochtones. Le gouvernement entend donc poursuivre ses efforts pour les promouvoir. Stephen Harper a d'ailleurs maintes fois affirmé qu'il souhaite exporter le pétrole canadien vers de nouveaux marchés en Asie.

Un marché mineur

Le Vieux Continent n'est pas un marché important pour les produits dérivés des sables bitumineux. La quasi-totalité des exportations canadiennes prennent le chemin des États-Unis.

En revanche, l'Union européenne songe à adopter une nouvelle réglementation pour inciter l'utilisation de pétrole dont la production est moins polluante, un projet qui est fortement contesté par Ottawa. Si la directive est adoptée, le pétrole de l'Ouest canadien serait classé dans une catégorie plus polluante car, selon les calculs de l'UE, sa production génère 22% de plus de gaz à effet de serre que les autres formes de bruts.

Il y a quelques semaines, le ministre des Ressources naturelles Joe Oliver s'en est pris à des écologistes «radicaux» et à des groupes d'intérêt étrangers qui s'opposent au développement des sables bitumineux. Cette sortie survenait 24 heures avant le début d'une consultation sur le pipeline Northern Gateway, qui doit acheminer le pétrole canadien à l'océan Pacifique.

L'Assemblée des Premières Nations a refusé de commenter l'affaire, jeudi.