Les trois quarts des Québécois estiment que le gouvernement fédéral n'est pas assez sévère avec les pétrolières albertaines. Ils demandent par conséquent le report du projet de transport de sables bitumineux jusqu'à Montréal, le temps que la production pétrolière soit mieux encadrée.

C'est du moins les conclusions d'un sondage CROP mené pour le compte d'une coalition de trois groupes écologistes opposés aux visées de l'entreprise Enbridge, laquelle compte demander aux autorités fédérales la permission de transporter du pétrole brut de Fort McMurray jusqu'aux raffineries de l'est de l'île de Montréal.

Le dévoilement des résultats de cette enquête d'opinion, obtenue par La Presse, coïncide avec la publication, aujourd'hui dans nos pages, d'une publicité payée par cette coalition de groupes écolos (Défense environnementale, Équiterre et Forest Ethics). Il coïncide également avec la tenue, ce soir, du débat des chefs en français.

«Nous souhaitons que les partis politiques précisent ce qu'ils entendent faire d'une des plus importantes catastrophes environnementales de notre époque», a précisé Steven Guilbeault, d'Équiterre.

Plus précisément, 72% des répondants au sondage soutiennent qu'Ottawa privilégie «une mauvaise approche» dans le dossier des sables bitumineux, «car cela permet aux émissions totales de gaz à effet de serre d'augmenter».

Au contraire, 20% des Québécois estiment que le gouvernement fédéral a «la bonne approche», car il permet à la production pétrolière d'augmenter.

Les résultats sont similaires au sujet du projet d'Enbridge, qui compte demander en novembre à l'Office national de l'énergie la permission de renverser le flot d'un pipeline reliant Sarnia, en Ontario, et Montréal. Cela lui permettrait d'envoyer 240 000 barils de pétrole bitumineux jusqu'aux États-Unis, dont 80 000 s'arrêteraient à Montréal.

Or, les répondants y sont largement opposés: alors que 23% souhaitent que le projet soit approuvé, 72% voudraient plutôt qu'il soit «reporté jusqu'à ce que des lois plus sévères encadrent les émissions de gaz à effet de serre issus des sables bitumineux».

«Ces données sont encourageantes, a indiqué Matt Price, du groupe Défense environnementale. Elles montrent que malgré l'importance des questions économiques, les changements climatiques demeurent dans les priorités des Québécois.»

À ce sujet, d'ailleurs, les répondants du sondage CROP ont indiqué dans une proportion de 58% que la position des partis sur les sables bitumineux allait influencer leur vote; 39% ont répondu le contraire.

«Or, si le NPD, le Bloc et le Parti vert ont précisé leur point de vue, ce n'est à peu près pas le cas des libéraux. Quant aux conservateurs, ils n'ont absolument rien dit à ce propos», s'est désolé Steven Guilbeault.

Les néo-démocrates estiment qu'un moratoire est nécessaire sur l'attribution de nouveaux permis d'exploitation dans les sables bitumineux, le temps de mieux encadrer l'industrie. Les verts veulent plutôt interrompre la production pétrolière issue des gisements bitumineux. Quant au Bloc, il s'oppose à un moratoire, mais il compte faire obstacle au projet d'Enbridge.

francois.cardinal@lapresse.ca