À 10 jours de la convention démocrate à Denver, Barack Obama est la cible d'une nouvelle campagne menée par des conservateurs qui veulent le faire passer pour un gauchiste radical, un crypto-islamiste ou l'antéchrist lui-même.

Cette campagne peut déjà revendiquer un succès: dimanche, un livre anti-Obama prendra la première place de la liste des best-sellers du New York Times. Il s'agit d'un brûlot intitulé The Obama Nation, qui se prononce quasiment comme le mot «abomination».

Son auteur, Jerome Corsi, en est à son deuxième best-seller en autant de campagnes présidentielles. En 2004, il avait cosigné Unfit for Command (Inapte au commandement), un livre qui accusait John Kerry d'avoir menti sur son service militaire au Vietnam.

En 2008 comme en 2004, l'objectif de Corsi et de ses commanditaires est le même: défaire le candidat démocrate à la Maison-Blanche. Il y a quatre ans, le documentariste de gauche Michael Moore voulait également abattre un candidat présidentiel avec Fahrenheit 911. Il a perdu. Corsi a gagné, même si son livre était truffé d'insinuations et de mensonges.

Le succès commercial de La Nation Obama tient en grande partie à une campagne de marketing agressive et à l'achat du livre en gros par des groupes conservateurs. Cette semaine, le livre a été mentionné à la une du New York Times et du Washington Post, entre autres. Quant à son auteur, il a été invité sur plusieurs chaînes de télévision, dont CNN.

Dans son livre, Corsi décrit Obama comme un gauchiste radical qui tente de cacher ses «liens étendus avec l'islam». Selon l'auteur, le sénateur de l'Illinois a été élevé dans la foi musulmane lorsqu'il a vécu en Indonésie - de 6 à 10 ans - sous le toit du deuxième mari de sa mère.

L'ouvrage contient plusieurs allégations du genre, qui ont déjà été publiées sous une forme ou une autre sur l'Internet et niées par Barack Obama. Le livre met également en doute la sincérité du politicien de 47 ans sur son expérience passée avec la drogue. Dans son autobiographie, Rêves de mon père, le prétendant démocrate a affirmé ne pas avoir consommé de marijuana ou de cocaïne depuis l'âge de 20 ans.

Cette version ne satisfait pas Jerome Corsi. À la page 77 de son livre, il écrit: «Néanmoins, Obama n'a pas encore répondu à des questions lui demandant s'il avait déjà vendu de la drogue ou s'il avait arrêté complètement de consommer de la marijuana et de la cocaïne au collège ou si sa consommation s'est poursuivie jusqu'à la faculté de droit et au-delà.»

«Et qu'en est-il (de sa consommation de drogue) au Sénat des États-Unis?»

Le camp Obama a promis de répondre vigoureusement aux «calomnies» de Jerome Corsi. Il a notamment envoyé aux journalistes une liste des déclarations les plus incendiaires de l'auteur sur d'autres personnalités ou sujets. Par le passé, Corsi a notamment accusé Hillary Clinton d'être une lesbienne et qualifié l'islam de «virus». Il a également traité Jean-Paul II de «sénile».

Mais Jerome Corsi n'est pas l'unique pamphlétaire ayant choisi de cibler le prétendant démocrate. Un autre livre anti-Obama prendra dimanche sa place - la cinquième - sur la liste des best-sellers du New York Times. L'ouvrage, intitulé The Case Against Barack Obama et signé par David Freddoso, dépeint Obama comme un politicien corrompu et opportuniste qui tente de se faire passer pour un réformateur.

Pour négatif qu'il soit, ce portrait est quand même préférable à celui que l'on retrouve sur plusieurs sites Internet où Barack Obama est décrit comme l'antéchrist. Ce personnage de l'Apocalypse est connu de tous les chrétiens évangéliques ou fondamentalistes aux États-Unis, et plus particulièrement des lecteurs de la série de livres apocalyptiques Left Behind, qui présente l'antéchrist sous les traits d'un jeune politicien exotique, sexy et éloquent, qui fait la couverture des magazines.

Dans son dernier numéro, l'hebdomadaire Time s'est même demandé si le camp McCain avait tenté d'établir un lien entre Obama et l'antéchrist dans une publicité diffusée sur l'Internet et intitulée «L'élu».

Ce n'est décidément pas une campagne comme les autres.