Washington et Mexico soupçonnent le «cartel de Juarez» dans le meurtre d'une employée américaine du consulat des Etats-Unis à Ciudad Juarez, de son mari et de l'époux mexicain d'une autre collaboratrice du consulat, qui pourrait constituer un défi à la lutte antidrogue américano-mexicaine.

Les autorités des deux pays enquêtent ensemble sur ces crimes sans précédent, car jamais encore de telles attaques groupées simultanées contre des représentants officiels américains ne s'étaient produites au Mexique.

Les meurtres à Ciudad Juarez n'ont été toutefois qu'un des faits marquants d'une flambée de violence qui a fait plus de 100 morts dans tout le pays depuis le début du week-end, dont 45 dans la célèbre station balnéaire d'Acapulco (sud) et ses environs.

Le FBI a envoyé des agents à Ciudad Juarez, où le président mexicain Felipe Calderon est attendu mardi. Sa visite était certes prévue bien avant ces meurtres, et motivée par le massacre d'une quinzaine de jeunes gens dans une fête fin janvier, mais les meurtres des Américains lui donneront un autre relief.

Le consulat sera fermé mardi «pour revoir le dispositif de sécurité», a annoncé Washington, où le président Barack Obama s'est dit «scandalisé» par les meurtres de samedi.

Les autorités locales ont pointé du doigt «la bande des "Aztèques", des tueurs à la solde du cartel de Juarez», sur la base d'«informations échangées avec des agences fédérales américaines».

Pour Washington, il est important de «déterminer si les victimes ont été délibérément visées», ce qui pourrait dénoncer une volonté des trafiquants de provoquer à la fois les Etats-Unis et le gouvernement mexicain.

Les deux pays collaborent étroitement dans la lutte contre les cartels de la drogue. Le programme antidrogue américain dit de «l'Initiative de Merida» a notamment prévu une aide technique et financière de l'ordre de 1,4 milliard de dollars pour Mexico.

Au Mexique, la guerre entre les cartels pour le contrôle du trafic de drogue et de l'approvisionnement de l'énorme marché des Etats-Unis a fait plus de 15.000 morts ces trois dernières années, en dépit du déploiement de plus de 50.000 militaires en renfort de la police.

Ciudad Juarez est le principal théâtre de ces affrontements. Cette ville de 1,3 million d'habitants a enregistré plus de 2.600 meurtres en 2009.

«Rien ne nous indique encore que ces personnes ont été précisément choisies. Mais il est clair que deux faits séparés se sont produits au même moment, ce qui est préoccupant», a expliqué un fonctionnaire du département d'Etat joint au téléphone à Washington.

Les trois victimes ont été abattues par des tueurs alors qu'elles rentraient samedi de la même réception, regagnant en voiture leurs domiciles respectifs à Ciudad Juarez, à la frontière de l'Etat du Texas, selon un responsable américain.

Le gouvernement de l'Etat mexicain de Chihuahua, dont fait partie Ciudad Juarez, a publié l'identité des victimes: la fonctionnaire, Lesley A. Enriquez, tuée avec son mari Arthur Haycock Redelfs, et Jorge Alberto Salcido Ceniceros, l'époux mexicain d'une autre employée du consulat. Sa femme et lui rentraient séparément, chacun au volant de sa voiture.

Aussitôt après les meurtres, le département d'Etat a autorisé le rapatriement pour raisons de sécurité de tous les membres américains des familles du personnel consulaire le long de la frontière commune, soit plus de 3.000 km de la Californie au Texas.