Onze personnes accusées de faire partie d'un réseau d'espionnage russe en sol américain ont été arrêtées par le FBI, cette semaine, un coup de filet qui évoque les tensions de la guerre froide. Les autorités fédérales affirment qu'il s'agit de la «pointe de l'iceberg» d'un complot plus vaste.

Les accusés opéraient sous de fausses identités. Quatre d'entre eux prétendaient être canadiens, dont Christopher Metsos, arrêté hier dans l'île de Chypre alors qu'il tentait de prendre un vol pour Budapest. Il a été mis en liberté, sans son passeport, en échange d'une caution de 24 000$.

 

Selon les autorités, Metsos, âgé de 54 ans, était le lien entre les différents agents postés aux États-Unis. Il est notamment accusé d'avoir reçu de la part d'un agent russe de l'argent qu'il a enterré dans un parc du nord de la Virginie afin qu'un autre agent en prenne possession.

Les descriptions notées par les enquêteurs se lisent comme un roman d'espionnage. Le 16 mai 2004, par exemple, le FBI a noté: «Metsos et un contact russe échangent leurs sacs dans une cage d'escalier de la gare. Plus tard, Metsos donne de l'argent à Murphy en lui disant les phrases codées: «Va voir cet homme, dis-lui qu'oncle Paul l'aime... C'est merveilleux d'être le père Noël au mois de mai.»»

Selon la poursuite, les accusés avaient pour mission de trouver de l'information sur les armes nucléaires, sur la politique des États-Unis envers l'Iran et sur la CIA. Aucune information stratégique n'a été dévoilée, selon le gouvernement.

Les personnes arrêtées ont été accusées de blanchiment d'argent, mais non d'espionnage. Elles sont passibles de cinq ans d'emprisonnement. Le FBI affirme que l'enquête est en cours depuis plus de 10 ans et qu'il a agi parce qu'un des accusés s'apprêtait à aller en Russie.

Arrière-goût de guerre froide

L'arrestation des 11 ressortissants est «infondée», selon Moscou. Les observateurs russes ne croient toutefois pas que l'incident menace le «redémarrage» des relations russo-américaines lancé par l'administration Obama.

Le scandale survient quelques jours après la visite à la Maison-Blanche du président russe, Dmitri Medvedev, qui avait été teintée d'une franche camaraderie.

La Maison-Blanche a tenu à minimiser l'importance des arrestations, hier, et a soutenu que les relations avec Moscou ne seraient pas compromises.

Le premier ministre Vladimir Poutine, de son côté, a dit espérer que cette affaire ne nuirait pas aux relations entre les deux pays. «La police s'est laissée aller chez vous. On met des gens en prison», a-t-il déclaré à l'ancien président américain Bill Clinton, en visite en Russie.

Sur toutes les chaînes, les journalistes russes ont minimisé l'incident et rappelé que les 11 suspects faisaient face à des accusations de conspiration et de blanchiment d'argent, et non d'espionnage à proprement parler.

«La télévision américaine présente actuellement un film d'espionnage», a raillé hier le lecteur de nouvelles de NTV, contrôlée par le Kremlin, avant un reportage sur l'affaire.

Le Canada muet

Le gouvernement canadien n'a réagi qu'hier après-midi, et ses commentaires se sont résumés à un bref courriel du ministère des Affaires étrangères: «Ceci est une enquête américaine. Nous continuons de collaborer avec nos alliés sur la question. Étant donné que l'enquête est en cours, aucun autre détail ne peut être fourni pour l'instant.»

Avec la collaboration d'Hugo De Grandpré à Ottawa