Un important groupe de défense des droits humains demande à Ottawa de déposer des accusations criminelles contre l'ancien vice-président américain Dick Cheney pour son rôle présumé dans la torture de deux prisonniers canadiens, Maher Arar et Omar Khadr.

Dick Cheney se rendra à Vancouver lundi pour faire la promotion de son autobiographie intitulée In My Time: A Personal and Political Memoir, qui reflète sa perception de la guerre contre le terrorisme et d'autres événements s'étant déroulés sous la présidence de George W. Bush.

Human Rights Watch affirme qu'il existe de multiples preuves des actes de torture autorisés par l'administration Bush, dont au moins deux cas impliquant des citoyens canadiens. Le Canada devrait enquêter sur le comportement de Dick Cheney et vérifier s'il respectait la Convention des Nations unies contre la torture.

La législation canadienne prévoit expressément que les tribunaux peuvent entendre tout dossier de torture si la victime est un Canadien, même si les sévices ont eu lieu à l'étranger.

Ottawa a signé ce traité en 1987, avant d'incorporer ses principes dans le Code criminel, rappelle dans un communiqué l'ONG basé à New York, aux États-Unis.

«Les États-Unis n'ont pas enquêté sur les actes de torture perpétrés par l'administration Bush, mais cela ne devrait pas empêcher d'autres pays d'être actifs», a dit Kenneth Roth, directeur exécutif de Human Rights Watch.

«La visite de M. Cheney à Vancouver est une rare occasion de palier à cet échec honteux d'application de la règle de la primauté du droit.»

Aucun porte-parole de l'ancien bras droit du président Bush n'a pu être rejoint pour commenter. L'ancien vice-président s'est toutefois démarqué dans le passé pour sa défense inconditionnelle des politiques de l'administration Bush.

M. Cheney a par ailleurs affirmé à de nombreuses reprises que les techniques d'interrogatoire comme la simulation de noyade avaient permis de sauver des «centaines de milliers de vies».

La demande de l'ONG fait écho à un appel semblable lancé vendredi par un député du Nouveau parti démocratique (NPD). Don Davies exige ainsi que le gouvernement fédéral interdise l'entrée au pays à M. Cheney.

Le député a fait parvenir une lettre au ministre de l'Immigration, Jason Kenney, le pressant de bloquer l'entrée de M. Cheney au Canada en raison du traitement infligé à certains détenus sous la présidence de M. Bush.

Personne n'a pu être joint au bureau de M. Kenney pour obtenir des commentaires.

Human Rights Watch assure avoir documenté le rôle des plus proches collaborateurs de George W. Bush dans les actes de torture commis contre MM. Arar et Khadr. La simulation de noyade et l'exposition prolongée au froid ou à la chaleur faisaient partie de leurs techniques, selon l'ONG.

Les autorités américaines ont déporté M. Arar, un Canadien né en Syrie, dans son pays d'origine en 2002 après son arrestation aux États-Unis, alors qu'il rentrait au Canada. L'homme a été emprisonné à Damas et torturé, faisant ainsi de fausses confessions sur ses liens avec des groupes terroristes.

M. Khadr a pour sa part été condamné il y a un an à Guantanamo, après avoir plaidé coupable à des accusations de crimes de guerre commis en Afghanistan. Il était âgé de 15 ans à l'époque.

«L'enquête canadienne sur le cas Maher Arar montre qu'il y a assez de preuve pour se pencher sur les actions de Dick Cheney», fait valoir M. Roth.

«M. Bush, M. Cheney et d'autres ont autorisé un régime de détention abusif auquel des Canadiens et des milliers d'autres individus ont été confrontés.»

Des militants anti-guerre devraient par ailleurs manifester à Vancouver pendant le séjour de M. Cheney.