Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a estimé mardi que la planète était bien partie pour une «génération sans sida», après l'annonce par les Nations unies d'une chute de 35 % des infections par le virus VIH sur 15 ans.

«Le monde a réussi. Nous avons réussi et dépassé (...) les objectifs concernant le sida (...) Nous allons vers une génération sans sida», a-t-il lancé depuis Addis Abeba, où il participe à une conférence internationale sur le financement du développement.

Il faudra encore débourser 32 milliards de dollars par an d'ici à 2020 pour espérer en finir avec le sida d'ici à 2030, mais les nouvelles infections par le VIH ont chuté de plus d'un tiers depuis 2000, selon un rapport de l'ONUSIDA publié à Genève et présenté mardi par Ban Ki-moon dans la capitale éthiopienne.

En 2000, les Nations unies avaient fixé huit grands Objectifs du Millénaire pour 2015, dont combattre le VIH/sida.

Ce dernier objectif a été atteint grâce aux milliards de dollars investis, dont près de la moitié par les États-Unis. Entre 2000 et 2014, les nouvelles infections ont reculé de 35,5 %, à 2 millions. Encore mieux, elles se sont effondrées de 58 % parmi les enfants.

Les décès liés au sida ont quant à eux chuté de 41 % (à 1,2 million) depuis le pic de 2004.

À titre d'exemple, l'hôpital Zewditu d'Addis Abeba est parvenu à réduire de presque 100 % le nombre de nouveau-nés infectés, avec seulement un cas en 2014, s'est félicité Ban Ki-moon. Le secrétaire général a également salué les performances de la Namibie, où 95 % des femmes enceintes ont désormais accès aux traitements HIV.

«Nous avons brisé la trajectoire de l'épidémie. Nous voyons une baisse du nombre d'infections dans 83 pays», s'est félicité Michel Sidibé, directeur d'ONUSIDA depuis Addis Abeba.

Si le nombre de personnes vivant avec le VIH/sida continue d'augmenter - 36,9 millions l'an dernier, soit 700 000 de plus que l'année précédente -, c'est qu'il est désormais possible de vieillir avec le sida grâce aux thérapies antirétrovirales, toujours plus efficaces et faciles d'accès.

Quelque 15 millions de personnes sont sous traitements antirétroviraux (TARV) en 2015, contre seulement 1 million en 2001.

«Mettre fin à l'épidémie de sida (...) d'ici à 2030 est ambitieux, mais réaliste», a encore estimé Ban Ki-moon.

Mais «nous devons d'urgence mener des efforts à plus grande échelle ces cinq prochaines années», prévient l'ONU, demandant que près de 32 milliards de dollars soient investis chaque année d'ici à 2020, contre 21,7 milliards cette année.

«L'épidémie n'est pas enrayée, car nous avons 19 millions de personnes qui ne connaissent pas leur statut et 20 millions de personnes qui attendent leur traitement», a lui aussi nuancé M. Sidibé.

Pour parvenir à éliminer l'épidémie, l'ONU s'est fixé des objectifs intermédiaires pour 2020 en utilisant une formule «90-90-90» : 90 % des personnes infectées avec le VIH doivent le savoir (contre environ la moitié actuellement); 90 % des personnes connaissant leur statut doivent suivre un traitement; 90 % de celles qui sont traitées doivent voir leur charge virale supprimée (devenue indétectable).

Un vaccin dans la prochaine décennie

Grâce aux fonds, l'ONU espère surtout faciliter l'accès aux traitements dans le monde.

Elle appelle ainsi à une baisse des prix des matières premières utilisées dans la fabrication des antirétroviraux, et déplore que seules deux entreprises se partagent 71 % de ce marché. Le marché des outils de diagnostic est lui aussi dominé à 90 % par deux sociétés, alors que la demande augmente.

Le traitement est un outil essentiel pour mettre fin à l'épidémie du sida, mais il n'est pas le seul, soulignent les experts. Ceux-ci appellent à intensifier les efforts de prévention, par la distribution de préservatifs, l'élimination de la transmission mère-enfant (seul Cuba y est parvenu jusqu'à présent), la multiplication des services de réduction des risques pour les personnes qui s'injectent des drogues ou encore la lutte contre la violence faite aux femmes.

Le rapport regrette aussi qu'en 2014, 76 pays criminalisent toujours les relations entre personnes de même sexe et que 116 autres criminalisent les travailleurs du sexe.

L'ONU compte sur l'arrivée d'un vaccin durant la prochaine décennie, a expliqué Michel Sidibé.

L'Afrique subsaharienne reste la région la plus touchée, représentant 70 % des cas. Trois pays ont représenté plus de la moitié des nouvelles infections dans la région en 2014 : le Nigeria, l'Afrique du Sud et l'Ouganda.

Mais la région Asie/Pacifique, bien que moins affectée avec seulement 5 millions de personnes vivant avec le virus l'an dernier, préoccupe l'ONU en raison d'une recrudescence des cas. Les nouvelles infections y ont progressé de 3 % entre 2010 et 2014.

La Chine, l'Inde et l'Indonésie ont représenté 78 % des nouvelles infections dans la région l'an dernier.

LE SIDA EN CHIFFRES

Voici les principaux chiffres par thèmes sur l'épidémie de sida dans le monde fournis par l'ONUSIDA dans son rapport annuel pour l'année 2014, publié dans la cadre de la conférence internationale sur l'aide au développement à Addis Abeba.

- TOTAL : environ 36,9 millions de personnes vivaient en 2013 avec le virus du sida (36,2 millions en 2013, chiffre révisé à la hausse).

- DÉCÈS : environ 1,2 million de personnes sont mortes en 2014 de causes liées au sida (1,3 million en 2013, chiffre révisé à la baisse).

- NOUVELLES INFECTIONS : le virus du sida a contaminé 2,0 millions de personnes en 2014, un peu moins qu'en 2013 (2,1 millions). Par rapport à 2000, le nombre des nouvelles contaminations a baissé de 35 %.

- ENFANTS : environ 220 000 enfants sont nés avec le sida en 2014 (250 000 en 2013, chiffre révisé à la hausse). Les nouvelles infections parmi les enfants ont diminué de 58 % depuis 2000.

- AFRIQUE : l'Afrique subsaharienne continue à être la région la plus touchée avec toujours 70 % des cas de l'ensemble des personnes vivant avec le VIH dans le monde. Le virus touche particulièrement les femmes qui représentent plus de la moitié des personnes vivant avec le VIH dans la région. Les nouvelles infections ont diminué de 39 % entre 2000 et 2014.

- AFRIQUE DU NORD ET MOYEN-ORIENT : c'est la seule région, parmi celles en développement, à avoir connu une progression (+22 %) des nouvelles infections entre 2000 et 2014.

- TRAITEMENT : en mars 2015, 15 millions de personnes vivant avec le VIH avaient accès à une thérapie rétrovirale, contre 13,6 millions en juin 2014. Cela représente environ 41 % des personnes vivant avec le VIH.

- TUBERCULOSE : La tuberculose reste la principale cause de décès parmi les personnes vivant avec le VIH : environ un décès lié au sida sur cinq.