(Bagdad) Des manifestants ont brièvement pénétré dans l’ambassade de Suède à Bagdad jeudi, en signe de protestation après qu’un Irakien a brûlé des pages d’un exemplaire du Coran à Stockholm, un acte condamné par de nombreux pays musulmans.  

Les quelques dizaines de partisans du leader chiite Moqtada Sadr sont restés environ un quart d’heure dans la représentation diplomatique et en sont ressortis dans le calme à l’arrivée des forces de l’ordre, selon un photographe de l’AFP.

Les manifestants avaient d’abord protesté devant l’ambassade, à l’appel de Moqtada Sadr qui a exigé le « renvoi de l’ambassadeur » après l’action de Salwan Momika, préalablement autorisée par les autorités de ce pays.

PHOTO AHMED SAAD, REUTERS

Les manifestants avaient d’abord protesté devant l’ambassade de Suède, répondant à l’appel de Moqtada Sadr qui a exigé le « renvoi de l’ambassadeur » après l’action de l’Irakien Salwan Momika.

Mercredi, Salwan Momika a piétiné un exemplaire du Coran avant d’en brûler plusieurs pages devant la plus grande mosquée de Stockholm, au premier jour de l’Aïd al-Adha, la grande fête du sacrifice célébrée par les musulmans à travers le monde.

Jeudi, l’Irakien a déclaré qu’il renouvellerait son geste dans les dix jours.

« Dans les dix jours, je brûlerai le drapeau irakien et le Coran devant l’ambassade d’Irak à Stockholm », a déclaré Salwan Momika, âgé de 37 ans et ayant fui son pays pour la Suède, au quotidien suédois Expressen.

Il a affirmé être conscient de l’impact de son geste et avoir reçu déjà « des milliers de menaces de mort ».

Des actions similaires ont par le passé eu lieu en Suède ou dans d’autres pays d’Europe, parfois à l’initiative de mouvements d’extrême droite, entraînant manifestations et tensions diplomatiques.

Dès mercredi soir, le gouvernement irakien a condamné « des actes racistes, incitant à la violence et à la haine ». Jeudi soir, le ministère des Affaires étrangères irakien a annoncé avoir convoqué l’ambassadrice de Suède à Bagdad Jessica Svärdström pour « l’informer de la vive protestation » de l’Irak concernant l’autorisation donnée par son pays à des « extrémistes » de brûler le Coran.

Les États-Unis se sont dits « profondément préoccupés » par le geste de Salwan Momika qui « a créé un climat de peur qui empêchera les musulmans et les membres d’autres minorités religieuses d’exercer librement leur droit à la liberté de religion » en Suède, tout en approuvant le fait que la manifestation ait été autorisée.

« La délivrance d’une autorisation pour cette manifestation soutient la liberté d’expression et ne constitue pas une approbation des actions de la manifestation », a déclaré le porte-parole du département d’État, Matthew Miller.

« Actes haineux »

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a lui aussi fustigé jeudi la Suède pour avoir autorisé l’évènement. « Nous enseignerons aux Occidentaux arrogants qu’insulter les musulmans ne relève pas de la liberté d’expression », a-t-il déclaré.

L’Arabie saoudite a dénoncé des « actes haineux et répétés […] incitant à la haine, à l’exclusion et au racisme, tandis que le Koweït a appelé à ce que les auteurs de tels » actes hostiles « soient jugés.

Un « crime odieux » et « une provocation flagrante et délibérée », a aussi dénoncé le ministère tunisien des Affaires étrangères.  

À Téhéran, le chef de la diplomatie iranienne Hossein Amir-Abdollahian a « condamné fermement l’insulte aux livres saints et au Coran ».  

 « Qualifier ces comportements de liberté et de démocratie ne fait qu’encourager le terrorisme et l’extrémisme », a-t-il lancé.  

Le Maroc a rappelé son ambassadeur en Suède, condamnant « des provocations répétitives, commises sous le regard complaisant du gouvernement suédois ».  

Les Émirats arabes unis ont convoqué l’ambassadeur de Suède à Abou Dabi pour « condamner la décision de la Suède d’autoriser des extrémistes à brûler des exemplaires » du Coran.

L’Égypte, le plus peuplé des pays arabes, a fustigé un « geste honteux et une provocation pour les sentiments des musulmans ».

 « Silence » de la Suède

La Libye a exprimé son « étonnement du silence des autorités suédoises face à ces provocations fréquentes », alors que la Syrie a « condamné avec la plus grande fermeté l’acte honteux » commis « par un extrémiste avec la permission […] du gouvernement suédois. » 

 « L’insulte aux religions est incompatible avec la liberté religieuse », a déclaré le ministère bahreïni des Affaires étrangères.

À Beyrouth, le puissant mouvement chiite Hezbollah a accusé les autorités suédoises d’être « complices du crime ».

Le ministère palestinien des Affaires étrangères a, lui, dénoncé une « violation flagrante des […] valeurs de tolérance, d’acceptation des autres ».

Des organisations dans la région ont également réagi, comme la Ligue arabe qui a condamné une « agression au cœur de notre foi musulmane ».

L’Organisation de la coopération islamique (OCI) a annoncé la tenue d’une « réunion d’urgence » la semaine prochaine à Jeddah, en Arabie saoudite, pour « discuter des mesures contre ces actes ignobles ».

À Kaboul, le gouvernement taliban a dénoncé un « mépris total » envers l’islam.

Une manifestation en janvier au cours de laquelle un exemplaire du Coran avait été brûlé à Stockholm devant l’ambassade de Turquie avait suscité la colère à travers le monde musulman et des manifestations et appels au boycottage de produits suédois.