Les craintes que le conflit dans la bande de Gaza s’étende à d’autres pays du Proche-Orient étaient vives mercredi, au lendemain de l’assassinat du no 2 du Hamas palestinien au Liban, et après un attentat en Iran. Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, entamera ce jeudi une nouvelle tournée diplomatique dans la région, y compris en Israël.

Liban

Mercredi soir, le chef du Hezbollah pro-iranien a mis Israël en garde contre le déclenchement d’une guerre au Liban. « Pour le moment, nous combattons sur le front de façon calculée […], mais si l’ennemi pense lancer une guerre contre le Liban, nous combattrons sans limites, sans restrictions, sans frontières […] », a assuré Hassan Nasrallah dans un discours retransmis en direct à la télévision. « Nous ne craignons pas la guerre », a-t-il martelé.

Ce discours survient au lendemain de la première frappe sur les abords de Beyrouth, attribuée à Israël, depuis le début de la guerre à Gaza. Le no 2 du Hamas, Saleh al-Arouri, et six autres responsables et cadres de la formation palestinienne alliée au Hezbollah ont été tués dans cette frappe.

Dans ce contexte, l’Allemagne a appelé ses ressortissants à quitter rapidement le Liban mercredi.

Yémen

PHOTO MOHAMMED HUWAIS, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le 29 décembre dernier, des Yéménites ont marché dans les rues de Sanaa en soutien aux Palestiniens.

Depuis le début de ce conflit, les tensions se multiplient à la frontière en Syrie et en Irak, où des bases américaines sont prises pour cible. Les tensions sont aussi vives en mer Rouge, où les rebelles houthis du Yémen mènent des attaques pour freiner le trafic maritime. Cette zone stratégique voit passer 12 % du commerce maritime mondial.

Mercredi encore, les houthis ont affirmé avoir mené une « opération » contre un navire du transporteur français CMA CGM en mer Rouge.

Au total, 18 compagnies de transport maritime contournent désormais le continent africain pour éviter la mer Rouge, a indiqué à l’Organisation des Nations unies (ONU) le chef de l’Organisation maritime internationale (OMI). Ce détour fait flamber les coûts du transport.

Mercredi, une coalition menée par les États-Unis a exhorté les houthis à cesser « immédiatement leurs attaques illégales » de navires marchands en mer Rouge, faute de quoi ces rebelles, proches de l’Iran, en assumeront les « conséquences ».

« Notre message doit être clair : nous demandons l’arrêt immédiat de ces attaques illégales et la libération des navires et des équipages détenus illégalement », a affirmé cette coalition de 12 pays – dont le Canada – dans un communiqué diffusé par la Maison-Blanche.

Génocide

PHOTO JACK GUEZ, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des volutes de fumée s’élèvent d’immeubles détruits par des frappes israéliennes dans le centre de la bande de Gaza.

La plus haute juridiction de l’ONU entendra la semaine prochaine les arguments de l’Afrique du Sud et d’Israël, après le dépôt par Pretoria d’une requête contre Israël pour « génocide » dans la bande de Gaza.

En effet, la Cour internationale de justice (CIJ) tiendra des audiences publiques les 11 et 12 janvier prochains, a-t-elle indiqué par communiqué.

L’Afrique du Sud souhaite que la CIJ ordonne d’urgence la suspension des opérations militaires à Gaza, estimant qu’Israël « s’est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes de génocide contre le peuple palestinien à Gaza ».

« Israël rejette avec dégoût la diffamation […] propagée par l’Afrique du Sud et son recours à la Cour internationale de justice », a réagi sur X le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Lior Haiat.

« Cette requête est infondée, contre-productive et n’est basée sur aucun fait », a aussi estimé le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison-Blanche, John Kirby, mercredi, critiquant l’initiative sud-africaine.

Près de trois mois de guerre

PHOTO LEO CORREA, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Chars d’assaut israéliens garés à la frontière avec la bande de Gaza, dans le sud d’Israël, le 1er janvier dernier

Dans la bande de Gaza elle-même, l’armée israélienne a poursuivi mercredi ses opérations et ses bombardements, notamment à Khan Younès, où le ministère de la Santé du Hamas a fait état de « nombreux » morts.

Le Hamas dispose toujours d’« importantes capacités » à Gaza, après presque trois mois d’opérations, a estimé mercredi John Kirby. « Nous pensons que réduire et défaire les capacités du Hamas à mener des attaques à l’intérieur d’Israël est un objectif absolument réalisable pour les forces militaires israéliennes », a-t-il ajouté.

Les 2,4 millions d’habitants du territoire font face à de graves pénuries de nourriture, d’eau, de carburant et de médicaments. Malgré une résolution de l’ONU, l’aide humanitaire entre au compte-gouttes.

Selon le plus récent bilan du Hamas, la guerre a coûté la vie à 22 313 Gazaouis, majoritairement des femmes, des adolescents et des enfants.

Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Cameron, a estimé mercredi qu’il fallait « en faire plus » pour acheminer l’aide à Gaza. Il a appelé Israël à autoriser un nombre important de fournitures pour réduire le risque de famine. « Le Royaume-Uni souhaite également la libération immédiate des otages et des progrès vers un cessez-le-feu durable », a ajouté le ministre.

Déplacements forcés

PHOTO AGENCE FRANCE-PRESSE

Des femmes discutent dans un camp de fortune abritant des Palestiniens déplacés, à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.

Des pays traditionnellement alignés sur Israël ont mis en garde son gouvernement de droite contre l’idée d’un déplacement de résidants hors de la bande de Gaza. Le Canada serait considéré par Israël comme un endroit où déplacer des Gazaouis.

Le ministre israélien des Finances, Bezalel Smotrich, a déclaré cette semaine que son pays devrait « encourager la migration » des Palestiniens de Gaza et y rétablir les colonies israéliennes, faisant écho à des commentaires similaires du ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir.

Le mois dernier, des membres du Likoud, le parti du premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, auraient aussi discuté des pays qui seraient prêts à accepter les Palestiniens de Gaza comme réfugiés.

Le porte-parole du département d’État américain, Matthew Miller, a condamné les propos « incendiaires et irresponsables » des deux ministres israéliens. Le président français, Emmanuel Macron, les a qualifiés d’« inacceptables ».

Une porte-parole du ministre canadien de l’Immigration, Marc Miller, a déclaré que le Canada ne tolérerait pas le déplacement massif de Palestiniens.

« En réponse à la situation à Gaza, notre priorité est de réunir les familles d’une manière qui n’entrave pas leur capacité à retourner à Gaza, lorsque les circonstances le permettent », a déclaré mercredi l’attachée de presse de M. Miller, Bahoz Dara Aziz.

Ce commentaire répond à un article du quotidien Israel Hayom citant des sources anonymes qui soutiennent qu’un député de la Knesset aurait évoqué le Canada, mentionnant le nouveau programme fédéral qui offre des visas limités aux proches de citoyens canadiens qui cherchent à quitter Gaza.

Visite diplomatique

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Antony Blinken, secrétaire d’État américain

Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, entamera jeudi une nouvelle navette diplomatique au Proche-Orient avec une étape prévue en Israël, a déclaré à l’AFP un responsable américain sous couvert d’anonymat.

Il s’agira de la cinquième visite officielle en Israël de M. Blinken depuis le début de la guerre, le 7 octobre.

Le conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, et le ministre de la Défense, Lloyd Austin, se sont aussi rendus dans la région, ainsi que le président Joe Biden au tout début du conflit qui entrera dans les prochains jours dans son quatrième mois.

Avec l’Agence France-Presse et La Presse Canadienne