Quand ils sont arrivés comme coopérants au Sénégal, il y a 12 ans, Christiane Pelchat et Serge Marcil ont pris sous leur aile une dizaine de gamins qu'ils voyaient mendier dans les rues de Saint-Louis, au nord du pays.

Après son retour au Québec, le couple a continué à aider ses petits protégés. Devenue présidente du Conseil du statut de la femme, Christiane Pelchat, qui a perdu son mari dans le tremblement de terre en Haïti, fait partie de la délégation de la gouverneure générale pendant sa tournée africaine.

 

Samedi, Christiane Pelchat, que l'on surnomme ici «madame Talibé», a revu deux de «ses» garçons, Mamadou et Souleymane, aujourd'hui âgés de 18 et 16 ans.

Quand elle les avait rencontrés, Mamadou venait d'être placé chez le marabout à la suite de la mort de son père. Souleymane avait 4 ans et avait été arraché à sa mère après un divorce.

«Chaque minute de leur vie était un enfer, ils étaient perpétuellement humiliés, battus, rejetés», dit Christiane Pelchat.

La réinsertion des talibés est un exercice de haute voltige. Des 10 garçons de Christiane Pelchat, l'un est mort de maladie. Trois ont disparu sans laisser de trace. Un autre vient d'être récupéré par son marabout. Mais quatre ont pu retrouver leur famille.

C'est le cas de Mamadou, qui va à l'école et vit chez sa soeur. Les choses sont plus difficiles pour Souleymane, garçon au visage torturé qui se recroqueville quand on lui parle. Dans les derniers temps, il vivait dans un centre d'aide aux talibés. Mais la discipline, très peu pour lui. Alors, il est retourné chez un marabout. Une semaine après, il était infesté de gale.

Christiane Pelchat et son mari ont créé une fondation pour aider les talibés à trouver une place dans la société. Objectif: mettre sur pied une coopérative agricole et un atelier de menuiserie, afin de leur apprendre à gagner leur vie autrement qu'en tendant la main.

L'exploitation des talibés est une véritable plaie qui dépasse les frontières du Sénégal, déplore Mme Pelchat.

«Dans d'autres pays, les enfants servent de chair à canon. Ici, ils sont des machines à sous.»