Les Kényans ont approuvé à une très large majorité le projet de nouvelle Constitution censée renforcer la démocratie dans les institutions et engager une réforme foncière cruciale, tournant une page «historique» après les violences post-électorales de 2007-2008.

La nouvelle loi fondamentale du pays a été approuvée avec 67,25% des voix lors du référendum de mercredi, selon les résultats définitifs proclamés jeudi soir par la Commission électorale intérimaire indépendante (IIEC).

Le «oui» a obtenu 5.954.767 voix, tandis que 2.687.183 votants se sont exprimés en faveur du «non» (30,35%).

Près de huit millions d'électeurs ont voté sur les 12,4 millions enregistrés, soit un taux de participation de 71%, selon la commission, qui a confirmé ainsi sans surprise et officiellement la large victoire des partisans de la nouvelle Constitution.

Dès le milieu d'après-midi, au vu des décomptes régulièrement tenus par l'IIEC, le président Mwai Kibaki a salué la victoire du «oui». «Ce voyage, commencé il y a 20 ans, arrive à un dénouement heureux (...)», a-t-il déclaré.

«Adopter cette nouvelle Constitution sera une victoire pour le Kenya et pour les nombreuses personnes qui se sont battues avec obstination pour ce texte qui reflète nos espoirs et nos aspirations», s'est félicité le chef de l'Etat.

«Les Kenyans ont parlé d'une seule voix», a salué pour sa part le Premier ministre du gouvernement d'Union nationale, Raila Odinga.

Défendue par MM. Kibaki et Odinga, la nouvelle Constitution kényane vise à rendre les institutions du pays plus démocratiques, crée une chambre haute du Parlement (Sénat) et renforce les attributions de l'Assemblée nationale pour contrebalancer le pouvoir du président, qui peut faire l'objet d'une procédure de destitution.

Elle prévoit également une réforme foncière cruciale, contestée notamment par les leaders de la communauté kalenjin qui ont agité lors du référendum le spectre de la confiscation de terres par l'Etat.

Le leader du camp du «non, le ministre de l'Enseignement supérieur William Ruto, a concédé la défaite dès la mi-journée: «nous avons accepté le verdict de la majorité (...)», a-t-il déclaré, proposant cependant «un mécanisme de consultation pour déterminer comment les sujets de contentieux dans la Constitution peuvent être amendés».

«Ceux qui ont exprimé des opinions différentes sur la nouvelle Constitution continueront d'être entendus dans le cadre des institutions démocratiques mises en place» par la nouvelle Loi fondamentale, a assuré à ce propos le président Kibaki.

Le bon déroulement du référendum contraste avec les violences meurtrières qui avaient accompagné la réélection controversée du président Kibaki le 27 décembre 2007 face à son adversaire d'alors, M. Odinga.

Ces violences avaient fait 1.500 morts, alimenté les ressentiments ethniques, sapé la confiance des électeurs dans leurs institutions et mis à mal l'image de stabilité du pays.

Sous la surveillance de quelque 70.000 membres des forces de sécurité déployés pour l'occasion dans le pays, le scrutin, malgré une campagne électorale tendue, a cette fois été bien organisé par une commission électorale totalement renouvelée et modernisée.

Le président des Etats-Unis Barack Obama a félicité le Kenya pour avoir organisé un référendum constitutionnel «pacifique, transparent et digne de foi». Londres y a vu une «décision qui fait date».

La chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a salué «un événement historique pour le pays et une étape importante dans le programme de réformes» engagées par le gouvernement kényan.

«Il n'y a ni perdant ni vainqueur dans ce référendum. C'est le Kenya lui-même qui a triomphé», s'est félicité pour sa part l'ancien secrétaire général de l'ONU et médiateur dans la crise kényane, Kofi Annan, qui avait négocié l'accord de partage du pouvoir de février 2008.

Photo: AFP

Des femmes appartenant à la tribu Turkana attendent de pouvoir déposer le bulletin de vote dans un bureau de Lyangalani, dans le nord-ouest du pays.