Les manifestations contre le régime ont tourné à la violence mercredi en Egypte, avec la mort de deux personnes lors de heurts avec la police et l'attaque de bâtiments aux cocktails molotov, au 2e jour d'une contestation sans précédent en près de 30 ans de règne de Hosni Moubarak.

En outre, 70 personnes, 55 manifestants et 15 policiers, ont été blessées lors d'affrontements avec la police dans la ville portuaire de Suez, à 100 km à l'est du Caire, selon des sources médicales.

La police a également procédé à l'arrestation de 500 personnes, portant à au moins 700 le nombre de personnes interpellées en deux jours de mobilisation populaire, à l'appel du «Mouvement du 6 avril», un groupe pour la démocratie qui réclame des réformes politiques, économiques et sociales dans le pays.

La communauté internationale, dont les État-Unis, l'Union européenne et l'ONU, ont appelé le gouvernement égyptien à écouter les demandes du peuple.

Des milliers de manifestants sont descendus dans la rue dans plusieurs villes du pays malgré une interdiction stricte des autorités.

Au Caire, un policier et un manifestant ont été tués lors de heurts, selon des sources médicales.

«Nous voulons faire tomber le régime», ont scandé les protestataires en lançant des pierres sur les policiers qui ont tiré des gaz lacrymogènes et des balles caoutchoutées, ont indiqué les témoins.

Les deux décès portent à six le nombre de personnes tuées en deux jours de protestations.

Dans un autre quartier du Caire, des dizaines de manifestants ont affronté les forces de sécurité devant le ministère des Affaires étrangères, dont ils ont forcé l'une des entrées avant d'être dispersés par des tirs de gaz lacrymogènes, selon un correspondant de l'AFP sur place.

A Suez, les affrontements ont éclaté après le refus de la police de remettre le corps d'un des trois manifestants morts la veille aux protestataires.

Ceux-ci ont ensuite lancé des bouteilles incendiaires contre un bâtiment relevant de la municipalité, dont une partie a pris feu, selon des témoins. Ils ont aussi lancé des cocktails molotov contre le siège du parti de M. Moubarak et attaqué un poste de police à coups de pierres.

La police a fait usage de gaz lacrymogènes et de balles caoutchoutées pour les disperser.

Fer de lance du mouvement de protestation, le «Mouvement du 6 avril», très actif sur internet, a appelé dans un message diffusé par SMS et sur le réseau de socialisation Facebook, à de nouvelles manifestations vendredi après la prière «pour demander le droit de vivre dans la liberté et la dignité».

Il a demandé à ses sympathisants de transmettre rapidement le message en rappelant que le site de micro-blogs Twitter, très utilisé par les manifestants, était bloqué depuis mardi.

Outre Twitter, le site internet suédois Bambuser, qui permet de visionner directement «en flux» sur l'internet des vidéos filmées par téléphone mobile ou webcam, est bloqué. Concernant Facebook, des utilisateurs ont fait état de problèmes ponctuels d'accès.

Les Etats-Unis ont appelé l'Egypte, un de leurs proches alliés, à lever l'interdiction de manifester, et à ne pas perturber le fonctionnement des réseaux sociaux sur internet.

Les manifestations sont les plus importantes depuis l'arrivée au pouvoir en 1981 de M. Moubarak, 82 ans, objet de critiques pour n'avoir notamment jamais levé l'état d'urgence en place depuis près de 30 ans.

Dominés par des slogans demandant son départ, la contestation s'est inspirée de la révolte tunisienne qui a poussé à la fuite le président Zine El Abidine Ben Ali.

Avec plus de 80 millions d'habitants, l'Egypte est le pays le plus peuplé du monde arabe et plus de 40% de sa population vit avec moins de deux dollars par jour et par personne. Plusieurs immolations par le feu y ont eu lieu, rappelant celle d'un jeune Tunisien qui avait déclenché la révolte dans son pays.

Photo: AFP

Des policiers en civil arrêtent un manifestant.