Des militaires agissant sur ordre de la justice ont arrêté dimanche matin puis expulsé au Costa Rica le président du Honduras, Manuel Zelaya, sur le point d'organiser une consultation populaire pour prolonger son mandat, jugée illégale par la Cour suprême.

Le président du Congrès, Roberto Micheletti, a été désigné quelques heures plus tard nouveau chef de l'Etat du Honduras par le Parlement, et a décrété un couvre-feu de 48 heures dans ce pays d'Amérique centrale.

«Nous reconnaissons Zelaya comme étant le président constitutionnel régulièrement élu du Honduras. Nous n'en voyons pas d'autre», a réagi peu après un responsable du gouvernement américain qui a requis l'anonymat.

Le président américain Barack Obama s'était précédemment dit «profondément préoccupé» par la situation au Honduras et sa secrétaire d'Etat Hillary Clinton avait condamné des actions qui «violent les principes de la Charte démocratique interaméricaine».

L'assemblée générale des Nations unies se réunira en urgence lundi pour examiner la situation politique dans le pays, et le secrétaire de l'ONU, Ban Ki-Moon, a d'ores et déjà demandé que le président Zelaya soit rétabli dans ses fonctions.

Partout dans le monde, les condamnations de cette éviction se sont multipliées et notamment dans les rangs de la gauche radicale latino-américaine, dont M. Zelaya s'était rapproché ces dernières années après avoir été élu en 2006 sous l'étiquette de conservateur.

A Tegucigalpa, des centaines de manifestants ont réclamé son retour devant le palais présidentiel, entouré par des dizaines de soldats et des chars.

Les retransmissions des chaînes de télévision et de radio ont été interrompues, l'aéroport international a été fermé, l'électricité et les communications ont été coupées dans la capitale.

«Si les Etats-Unis ne sont pas derrière ce coup d'Etat, les putschistes ne pourront pas conserver le pouvoir», a déclaré le président Zelaya, encore vêtu du pyjama dans lequel il a été expulsé, à son arrivée à San José.

Huit de ses ministres ont aussi été arrêtés par les forces armées, a indiqué à l'AFP un fonctionnaire du gouvernement.

L'ambassadeur de Cuba au Honduras, Juan Carlos Hernandez, a également déclaré avoir été brièvement arrêté et frappé par des militaires, alors qu'il essayait de protéger la ministre hondurienne des Affaires étrangères, Patricia Rodas, avec l'aide de ses homologues du Venezuela et du Nicaragua.

L'armée n'a pas commis de «coup d'Etat», a affirmé M. Micheletti au cours d'une conférence de presse. Les militaires se sont limités à «exécuter une decision de justice», prononcée parce que M. Zelaya «enfreignait les lois du pays», a-t-il expliqué.

La Cour suprême du Honduras avait auparavant jugé illégale la consultation populaire que le chef de l'Etat, élu pour un mandat de quatre ans non renouvelable, voulait organiser dimanche pour ouvrir la voie à une révision de la Constitution lui permettant de briguer un deuxième mandat le 29 novembre.

Les pays membres de l'Alternative bolivarienne pour les Amériques (Alba), bloc antilibéral fondé par le Venezuela et Cuba auquel a adhéré le Honduras, ont dénoncé un «coup d'Etat».

Un sommet de l'Alba a été convoqué en urgence dimanche à Managua, selon le président vénézuélien Hugo Chavez qui a menacé «d'agir, y compris militairement», si son ambassadeur au Honduras était agressé.

Les ministres des Affaires étrangères du Système d'intégration centraméricain (SICA) ont exigé «le rétablissement immédiat dans ses fonctions» de M. Zelaya.

Le Brésil, l'Union européenne, Londres ou encore Paris ont également condamné l'expulsion du président élu du Honduras.

Le Groupe de Rio, dont le Honduras fait partie avec 22 autres pays latino-américains dont Cuba, dernier pays membre en date, a exprimé «sa condamnation la plus énergique».