Le Honduras a lancé mardi un mandat d'arrêt contre le président déchu Manuel Zelaya, au moment même où ce dernier recevait un soutien international unanime à la tribune des Nations unies.

M. Zelaya, renversé dans un coup d'Etat dimanche, sera arrêté «immédiatement» s'il revient au pays, où il est notamment poursuivi pour dix-huit crimes dont «haute trahison», «corruption» et «usurpation de fonctions», a déclaré le procureur général, Luis Alberto Rubi.

Au pouvoir depuis 2006, le président hondurien a été destitué pour avoir tenté d'organiser une consultation populaire ouvrant la voie à une possible réélection, un scrutin jugé illégal par la Cour suprême.

Depuis son exil, il a annoncé son intention de revenir jeudi achever son mandat au Honduras, avec une délégation de l'Organisation des Etats Américains (OEA) accompagnée par la présidente argentine Cristina Kirchner.

A New York, l'assemblée générale de l'ONU a réitéré, en sa présence, dans une résolution adoptée par acclamation, sa condamnation du «coup d'Etat dans la République du Honduras» et exigé son retour au pouvoir.

M. Zelaya a souligné qu'il refuserait d'assumer un second mandat dans son pays si on le lui demandait. «Je vais assumer mon mandat jusqu'au 27 janvier» 2010, a déclaré le dirigeant, élu pour un seul mandat de quatre ans.

Attendu mercredi à Washington, il devrait «probablement» rencontrer des responsables du département d'Etat américain, mais aucun entretien avec le président Barack Obama n'est prévu, a indiqué la Maison Blanche.

Les Etats-Unis ont toujours des installations militaires au Honduras, un pays pauvre de 7,5 millions d'habitants, utilisé comme base contre la guérilla en Amérique centrale dans les années 80.

Cependant à Tegucigalpa, des milliers de manifestants anti-Zelaya exprimaient leur soutien au nouveau gouvernement, tandis qu'une contre-manifestation de ses fidèles, «plus de 10 000» selon un de leurs représentants, se dirigeait vers le centre de la capitale.

Désigné par intérim à la tête de l'Etat, l'ex-président du Congrès, Roberto Micheletti, a remercié «les Honduriens courageux» qui défendent «la démocratie, la paix et la tranquillité dans ce pays», dans un discours sur la place centrale de la ville.

«Ce n'est pas un coup d'Etat», et «Zelaya, ne reviens pas», ont crié ses partisans.

La veille, des affrontements entre partisans du président évincé et l'armée avaient fait des blessés devant le palais présidentiel, 18 chez les militaires, selon l'armée, et 276 parmi les manifestants, selon leurs organisations.

M. Micheletti, qui bénéficie du soutien de la majorité de la classe politique et des médias, des chefs d'entreprise et d'une partie de la population, a répété qu'il n'y avait «pas eu de coup d'Etat».

Dans un entretien à la radio colombienne Caracol, il a aussi confirmé le mandat d'arrêt contre le président déchu.

«Les tribunaux de mon pays ont ordonné son arrestation car il a violé les lois», a-t-il dit.

Le net virage à gauche de M. Zelaya après son élection comme candidat de droite a hérissé une frange de la société hondurienne conservatrice. Avant la résolution de l'ONU, en sa faveur, M. Zelaya avait d'ailleurs déjà obtenu un appui sans faille de ses alliés «gauchistes» de l'Alliance bolivarienne pour les Amériques (Venezuela, Cuba, Nicaragua, Bolivie ou encore Equateur), qui ont rappelé leurs ambassadeurs.

Le ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, a aussi jugé mardi «urgent et nécessaire» pour les pays de l'UE de rappeler en consultations leurs ambassadeurs au Honduras.