Le socialiste Evo Morales, grand favori pour remporter un second mandat présidentiel dimanche en Bolivie, s'est forgé en quatre ans une image de champion de la cause autochtone adulé par ses partisans, mais dépeint comme populiste par ses détracteurs.

Premier chef d'État amérindien de Bolivie, Morales, «l'Amérindien noir et laid au nez de perroquet», selon ses propres termes, a acquis une notoriété sans mesure avec son petit pays andin. Résultat d'un discours pro-amérindien, d'inimitiés avec les États-Unis ou d'amitiés avec l'Iran et le Venezuela.

Mais pour 60% des habitants, de souche amérindienne, d'un des pays les plus pauvres d'Amérique latine, Evo est surtout «l'un des leurs».

Il est l'Aymara né il y a 50 ans dans un foyer démuni, sans eau courante ni électricité sur l'Altiplano sud, qui n'a jamais terminé l'école, a gardé des troupeaux de lamas et subsisté comme joueur de trompette itinérant.

Chassé des montagnes par la sécheresse, Juan Evo Morales Ayma s'est forgé politiquement dans les années 80-90 dans la région agricole du Chapare (600 km à l'est de La Paz). D'abord comme militant à la Centrale ouvrière bolivienne, puis comme député de la région et leader syndical des cultivateurs de coca, qu'il est toujours.

Frondeur social de premier plan sous les présidents libéraux (1995-2003), Morales devint le favori naturel de la présidentielle de 2005 à la tête du Mouvement vers le socialisme (MAS), après un échec en 2002. Il l'emporta au premier tour, avec 53% des voix.

Il a depuis placé l'Amérindien, la «refondation» autochtone du pays, ou «la deuxième et définitive» décolonisation de l'Amérique, au coeur de son projet et d'une nouvelle Constitution. En mêlant pragmatisme et mise en garde aux investisseurs: «On veut des partenaires, non plus des maîtres».

Fiers de sa fermeté, ses partisans louent sa modestie, sa chaleur, sa proximité avec le peuple. Et ses proches, dont le vice-président Alvaro Garcia, intellectuel du régime, saluent sa force de travail et sa qualité d'écoute.

Pour ses opposants, Morales est un autocrate en puissance, un populiste habité d'une mission historique. Mais qui reste un poids plume, dépendant de son mentor vénézuélien Hugo Chavez. D'où les surnoms dont ils l'ont affublé: «Chavez Light» et «Première Dame du Venezuela».

Le discours dramatique contre «l'empire» américain ou une opposition «putschiste, fasciste», inquiète ou amuse. Mais il peut aussi marquer les esprits, comme quand il vient défendre la feuille de coca rituelle en mastiquant des feuilles à une tribune de l'ONU en lançant: «Arrêtez-moi !»

Fort caractère, Morales est un lutteur, peu enclin au compromis, un homme de coups tactiques. Comme les «cercos», manifestations intimidantes autour du Parlement lors de sessions délicates, ou une grève de la faim médiatisée - cinq jours en avril - pour forcer l'adoption d'une loi.

Si l'homme d'État semble en campagne perpétuelle, l'homme est d'une grande discrétion dans sa vie privée. Célibataire et père de deux enfants, il goûte des plaisirs simples, comme la télévision, le football ou un repas entre amis.

Le Morales président est resté informel, tout en troquant plus d'une fois son blouson de cuir, ses chemisettes et ses baskets, pour d'élégantes vestes andines en alpaga de la styliste bolivienne Beatriz Cadeno. Mais jamais de cravate.

Un détail symbolique de la rupture de «l'Amérindien» avec les dirigeants traditionnels, historiques de la Bolivie.

pté en raison des restrictions à l'émigration des juifs à l'époque de l'URSS.