L'épidémie de choléra en Haïti semblait marquer le pas lundi avec une baisse du nombre de nouveaux décès, mais les Nations unies ont dit redouter une crise sanitaire d'ampleur nationale qui ferait des dizaines de milliers de malades.

L'épidémie a fait «259 morts» et conduit à «3342 hospitalisations», a indiqué lors d'une conférence de presse le directeur général du ministère de la Santé publique, Gabriel Thimoté. Cela représente six morts de plus que le bilan communiqué dimanche (253 morts et 3115 hospitalisations), lui même en hausse de 30 morts par rapport à la veille.

Le choléra, éradiqué à Haïti depuis plus de cent ans, a fait son apparition il y a quelques jours dans le nord du pays en raison de la mauvaise qualité de l'eau potable. La crainte est de le voir se développer à Port-au-Prince, où des centaines de milliers d'Haïtiens s'entassent dans des camps de fortune après le séisme du 12 janvier qui a fait plus de 250 000 morts.

La ministre haïtienne des Affaires étrangères, Marie Michèle Rey, avait assuré dimanche que la maladie semblait «contenue jusqu'à nouvel ordre». Faisant état d'une épidémie limitée géographiquement, elle s'était déclarée «confiante».

Mais depuis New York, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU a jugé qu'il serait prématuré de baisser la garde.

«Une épidémie d'ampleur nationale avec des dizaines de milliers de cas est une possibilité réelle», a expliqué l'ONU dans un communiqué. «La situation est extrêmement grave et sur la base de l'expérience que nous avons des épidémies ailleurs dans le monde, il serait irresponsable de ne pas se préparer à une épidémie beaucoup plus importante».

Sur place, le gouvernement haïtien a annoncé «une grande mobilisation» au niveau des élus, des communautés locales et des établissements scolaires afin de prévenir la propagation de la bactérie.

Autre axe de travail: déterminer comment améliorer la fourniture d'eau potable, dont la mauvaise qualité est à l'origine de l'épidémie.

«Le gouvernement, aidé de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et des Centre de contrôle des maladies américains (CDC), va rencontrer les vendeurs d'eau en Haïti», a poursuivi M. Thimoté.

Au camp du Champ de Mars, dans le centre de la capitale, où les chaumières en tôle et les tentes en plastique ont pris racine, les déplacés craignent l'épidémie. «J'ai peur que la maladie s'installe dans les camps», dit Elvia une jeune femme de 24 ans assise à l'entrée de sa tente, le visage dans la main.

«J'ai peur car personne n'est là pour s'occuper des sinistrés» du camp, ajoute-t-elle. «Nous savons quoi faire pour nous protéger, mais les enfants sont livrés à eux-mêmes. Ils ne se lavent pas convenablement et puis, regardez, les toilettes sont juste en face des tentes où nous vivons», dit-elle.

Le choléra, une maladie hautement contagieuse causée par une bactérie, provoque de très violentes diarrhées. Des mesures d'hygiène draconiennes et la fourniture d'une eau sûre demeurent en pratique les meilleurs moyens de stopper plus ou moins rapidement la progression d'une épidémie.

«La priorité désormais, c'est de traiter les gens, ce qui est très simple à faire: il s'agit de réhydratation dans 80% des cas», a souligné le porte-parole de l'OPS. «Nous avons des équipes sur place et nous en envoyons encore davantage, notamment des épidémiologistes qui connaissent le choléra».

La France de son côté prépare l'envoi d'une mission médicale.