Les Cubains se rendaient aux urnes dimanche pour des élections municipales que les dissidents ont appelées à boycotter et qui marquent le lancement d'un long processus électoral devant déboucher, en février, sur la probable réélection à la tête de l'État de Raul Castro.

«Cet exercice démocratique de notre peuple signifie aussi un soutien à ce qui a été réalisé» à la suite des décisions prises, en avril 2011, au VIe Congrès du Parti communiste cubain, le parti unique, qui a approuvé les réformes du président, a dit à la télévision la ministre de la Justice, Maria Esther Reus.

Les élections municipales interviennent cinq jours après l'annonce de la dernière grande réforme en date à Cuba, à savoir la levée d'une série d'entraves aux déplacements à l'étranger des habitants de l'île.

Plus de 8,5 millions d'électeurs (sur 11,2 millions de Cubains), les personnes âgées de plus de 16 ans, étaient convoqués pour élire 14 500 conseillers municipaux.

Les 29 500 bureaux de vote ont ouvert leurs portes à 7 h pour une durée de onze heures.

La Commission électorale a annoncé que le taux de participation sur les deux premières heures du scrutin avait été de 31%, soit 2,7 millions de votants.

Un second tour, lorsqu'un candidat n'obtient pas la majorité absolue, est prévu pour le 28 octobre.

Les 51 000 candidats ont été désignés en septembre au cours de plus de 50 000 réunions de quartier organisées dans les 168 municipalités, un processus populaire présenté comme «transparent et démocratique» par les autorités.

Toutefois, aucune surprise n'est attendue à l'issue de ces élections, aucun opposant ne figurant parmi les candidats en lice. «Le grand problème des élections à Cuba est que les gens ne croient pas qu'un quelconque changement va en sortir», a commenté la célèbre blogueuse d'opposition Yoani Sanchez sur son compte twitter.com/yoanisanchez.

«Il n'y a pas d'élections libres s'il n'y a pas d'hommes et de femmes libres», avait de son côté relevé l'opposant Oswaldo Paya, prix Sakharov 2002 de la liberté de pensée du Parlement européen, en juillet dernier, deux jours avant de mourir dans un accident de voiture.

Conséquence, l'opposition s'exprime généralement en s'abstenant, en votant blanc ou nul.

«Je crois personnellement (...) que nous ne devons pas aller aux urnes, parce qu'en fin de compte le gouvernement ne va rien faire», a dit à l'AFP Berta Soler, à la tête des Dames en Blanc, groupe d'épouses et autres proches d'ex-prisonniers politiques.

Aux précédentes municipales, en 2010, 95% des électeurs avaient voté et 8% de bulletins blancs ou nuls avaient été comptabilisés. Le vote n'est pas obligatoire à Cuba, mais, selon l'opposition, la pression des autorités locales sur la population est forte pour l'inciter à se rendre aux urnes.

Après leur élection, les assemblées municipales - renouvelées tous les deux ans et demi - désigneront les candidats aux élections des 15 assemblées provinciales et la moitié des candidats à l'Assemblée nationale, l'autre moitié étant désignée par huit organisations de masse - syndicat, femmes, étudiants, comités de quartier, etc.

Les dates des élections des assemblées provinciales (environ 1200 délégués) et nationale n'ont pas encore été fixées, mais le nouveau Parlement (élu tous les cinq ans) se réunit traditionnellement le 24 février, date-anniversaire du début de la guerre d'indépendance, en 1895.

L'Assemblée nationale (610 membres) élit alors parmi ses membres le Conseil d'État (31 membres aujourd'hui), qui désigne ensuite son président, Raul Castro depuis février 2008.

Ce pourrait alors être la dernière fois que Raul Castro, 81 ans, serait reconduit à la tête de l'État, puisqu'il a lui-même recommandé en janvier de limiter à deux le nombre des mandats de cinq ans des principaux dirigeants cubains.

L'élection du président sera la première depuis la mise en oeuvre de réformes ayant ouvert le système communiste à l'économie de marché et l'adoption de mesures d'ouverture sociale par Raul Castro, qui a officiellement succédé en 2008 - à l'issue de deux années d'intérim - à son frère Fidel, après que celui-ci a abandonné la présidence pour raisons de santé.