(Bogotá) Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté mercredi dans la capitale colombienne Bogota en soutien à la politique de réforme du président Gustavo Petro et à son gouvernement.

Répondant à l’appel du premier président de gauche (élu à l’été 2022) de l’histoire de la Colombie, indigènes, travailleurs et étudiants constituaient le gros de cette manifestation dans le centre historique de Bogota, a constaté l’AFP.

Les manifestants, dont des milliers de membres de gardes indigènes, drapés de foulards et drapeaux multicolores, bâtons à la main, ont parcouru plusieurs avenues du centre-ville dans la matinée pour ensuite se rassembler sur la célèbre place Bolivar, sous les fenêtres de la présidence.

« Pour des réformes progressistes de santé, du travail et des retraites », était-il écrit sur une pancarte. « Nous sommes ici pour soutenir le changement […] », a commenté une manifestante, Angela Vergara. Le président Petro a été élu à l’été 2022 sur la promesse de « changement », dont il avait fait son principal slogan de campagne.

« Cette mobilisation vise à défendre les réformes démocratiques », a plaidé mercredi le chef de l’État, s’exprimant devant la foule de ses partisans. « L’accord national que nous proposons a pour but de générer la justice sociale en Colombie », a-t-il de nouveau souligné, lançant « un appel à l’oligarchie colombienne, à ceux qui détiennent le pouvoir économique, afin que nous puissions parvenir à un grand accord national sur la vérité et la justice ».

« Appel à l’oligarchie »

« La vérité, l’éducation et la terre sont des éléments fondamentaux pour faire de la Colombie une grande nation », a ajouté le président Petro affirmant que son gouvernement œuvre pour « des conditions de vie décentes pour tous ».

« Nous ne parlons pas seulement d’augmentations de salaires ou de plus d’emplois, nous parlons de droits, de liberté et de démocratie, ce que ce pays a besoin de renforcer aujourd’hui », a plaidé de son côté la ministre du Travail, Gloria Ines Ramirez, battant le pavé au côté des marcheurs, avec une casquette rouge sur la tête, portant l’inscription « Réformes dans les rues ».

Ils étaient au moins 23 000 à la mi-journée, selon la mairie de Bogota. La présidence a fait état de 40 000 personnes sur la place Bolivar.

PHOTO LUISA GONZALEZ, REUTERS

Ces derniers jours, la présidence avait appelé les électeurs à manifester « pour la paix, pour la vie, et pour la justice sociale », en particulier après « les derniers actes de violence » de divers groupes armés dans le pays, alors que le gouvernement est sévèrement critiqué par l’opposition de droite pour ses tentatives de négociation avec ces mêmes groupes, dissidents de la guérilla marxiste des FARC qui rejettent l’accord de paix de 2016, et la guérilla guévariste de l’Armée de libération nationale (ELN).

L’opposition, mais aussi des médias ont par ailleurs dénoncé l’utilisation de fonds publics pour financer un grand concert prévu ce jour à Bogota, avec vedettes à l’affiche, comme la logistique des manifestations.  

S’inquiétant d’une « politisation » de cette marche à un mois des élections locales dans tout le pays, ils affirment également que le rassemblement vise à soutenir le candidat de gauche à la mairie de Bogota, l’ancien sénateur Gustavo Bolivar.

« Une autre marche », titrait le quotidien El Espectador, s’interrogeant sur « les doutes que suscite cette “marche pour la vie” convoquée par le gouvernement » dont l’organisation « coûte 263 millions de pesos » (85 000 dollars canadiens).

Le ministre de l’Intérieur, Luis Fernando Velasco, a reconnu que le gouvernement avait apporté « un certain soutien » en matière de transport et d’autres dépenses « conformément » à la loi, selon un communiqué présidentiel. Plusieurs bus ont transporté ces derniers jours des milliers d’indigènes en provenance de plusieurs régions du pays.

Depuis son investiture, M. Petro a eu plusieurs fois recours à la mobilisation de la rue pour soutenir sa politique, afin d’appuyer ses réformes contestées ou bloquées au parlement par l’opposition.

« Si nous avons un peuple organisé, ce gouvernement ne sera pas renversé », a-t-il réaffirmé mercredi.

Cette opposition s’est cristallisée ces derniers mois autour d’une réforme du système de santé, contestée par la droite, les centristes et les libéraux, mais mise en avant comme une réforme emblématique de la coalition de gauche pro-Petro qui ne dispose pas de majorité au Sénat.