(Bogotá) La guérilla colombienne de l’ELN a annoncé le gel des pourparlers de paix et une « crise ouverte » avec le gouvernement, dénonçant des « violations » des règles convenues dans le cadre des négociations lancées en 2022.

« Sans que cela soit de notre responsabilité, les discussions entre l’ELN (Armée de libération nationale) et le gouvernement national entrent dans une phase de gel, jusqu’à ce que le gouvernement soit disposé à respecter ses engagements », a indiqué la guérilla guévariste dans un communiqué daté du 19 février et diffusé dans la nuit de mardi à mercredi.

Elle accuse les autorités de Bogota de ne pas avoir respecté des règles convenues au démarrage des discussions qui se déroulent actuellement à Cuba.

La guérilla fustige notamment la mise en place d’un dialogue avec le gouverneur du département de Narino (sud-ouest), Luis Alfonso Escobar, en parallèle des pourparlers en cours.

« En rendant public un tel montage, déguisé en dialogue régional, le processus entre dans une crise ouverte et nous sommes obligés d’appeler à des consultations avec notre délégation de négociateurs », explique-t-elle dans son communiqué.

Luis Alfonso Escobar avait pour sa part déclaré dimanche à la presse que les discussions dans sa région devaient débuter la première semaine de mars. Il s’était réjoui de cette « territorialisation de la paix ».

Le gouvernement colombien n’a pas immédiatement réagi.

Trêves rompues

La semaine dernière, l’ELN avait pourtant donné un gage de bonne volonté en suspendant une « grève armée » qu’elle imposait dans l’ouest de la Colombie pour y dénoncer la « complaisance de la force publique » avec des groupes paramilitaires.

Cette « grève armée », qui avait obligé des milliers de paysans à rester cloîtrés chez eux, avait été durement critiquée par le négociateur gouvernemental et l’Église catholique, deux acteurs majeurs des négociations de paix, l’ELN étant accusée de ne pas respecter les termes de la trêve, alors en vigueur depuis août.

Le commissaire à la paix en charge pour le gouvernement des pourparlers avait lui mis en doute la volonté de dialogue de l’ELN et de l’État-major central (EMC), principale dissidence de l’ancienne guérilla marxiste des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) qui a signé un accord de paix historique de paix en 2016.

Élu en 2022 premier président de gauche de l’histoire du pays, Gustavo Petro a entamé des discussions avec les principaux groupes armés opérant en Colombie. Ce dialogue concerne l’ELN, mais aussi les dissidents des FARC qui rejettent l’accord de paix, ainsi que des groupes paramilitaires et des narcotrafiquants.

Plusieurs cycles de négociations ont déjà eu lieu au Venezuela, au Mexique et à Cuba, qui jouent le rôle de garants avec les gouvernements du Brésil, du Chili et de la Norvège. À ces pays s’ajoutent l’Allemagne, l’Espagne, la Suède et la Suisse, qui accompagnent les pourparlers, ainsi qu’un représentant du secrétaire général des Nations unies.

Présente dans l’ouest sur la côte Pacifique et dans le nord-est frontalier du Venezuela, l’ELN, dont les effectifs sont évalués à 5800 combattants, défie l’État colombien depuis sa naissance en 1964 dans le sillage de la révolution cubaine.