La Croix-Rouge a lancé hier deux messages SMS d'intérêt public à quelque 1,5 million de propriétaires d'un téléphone portable dans la grande région de Port-au-Prince. Une opération inédite à ce jour.

Le premier message prévenait la population qu'une campagne de vaccination contre la diphtérie, le tétanos et les oreillons sera lancée sous peu pour les 140 000 enfants de moins de 7 ans de la capitale.

 

Le second rappelait aux occupants des camps de ménager l'eau, essentielle à la cuisine et à l'hygiène.

Les messages ont été envoyés gratuitement par le réseau Voilà, l'une des deux entreprises de communication sans fil d'Haïti.

Derrière cette opération, il y a, notamment, un Montréalais, Jean-Pierre Taschereau, qui était jusqu'à hier le chef des opérations de la Croix-Rouge internationale en Haïti.

Il n'était pas peu fier, hier, lorsque La Presse l'a rencontré au QG de la Croix-Rouge internationale, de cette première offensive SMS humanitaire de l'histoire de la Croix-Rouge.

Cette nouvelle stratégie de communication ne représente toutefois qu'une infime partie de la tâche qu'a accomplie M. Taschereau en Haïti depuis trois semaines.

En tant que chef d'équipe, c'est lui qui dirige les 350 travailleurs humanitaires de la Croix-Rouge internationale ici et qui coordonne les opérations. Il fallait d'abord établir le camp de base. Celui-ci est fait pour 180 personnes. Il y en a presque le double maintenant.

Dans les premiers jours, la Croix-Rouge internationale avait établi ses quartiers dans un entrepôt où il n'y avait que deux douches et trois toilettes pour plus de 200 personnes. Maintenant, on utilise des tentes plantées sur un terrain vague près de l'aéroport.

Travaillant normalement au siège social de la Croix-Rouge canadienne, à Ottawa, Jean-Pierre Taschereau a été prêté pour diriger l'équipe internationale.

Depuis 2007, c'est la cinquième mission de M. Taschereau en Haïti.

«La dernière fois que je suis venu à Port-au-Prince, après un ouragan, en 2008, le directeur de la Croix-Rouge en Haïti m'avait dit: «Le pire scénario, ici, ce serait un tremblement de terre, et ça va arriver un jour.» Je ne pensais pas qu'il avait raison à ce point, raconte-t-il, visiblement exténué.

Exténué certes, mais Jean-Pierre Taschereau repart vers Montréal aujourd'hui avec le sentiment d'avoir accompli sa mission en installant ici une équipe internationale qui devrait rester au moins trois ans.

La Croix-Rouge internationale est maintenant pleinement opérationnelle et distribue, entre autres choses, 1 million de litres d'eau par jour et des milliers de trousses pour bâtir des abris plus solides qu'une tente.

Il croit aussi que, dans la situation chaotique qui frappe Port-au-Prince, la Croix-Rouge a adopté la bonne stratégie de distribution. Sans arme, avec l'aide de locaux regroupés en comité.

«Certaines ONG débarquent avec des soldats, qui déroulent du barbelé autour des camions, tirent des coups en l'air et distribuent ensuite, dit M. Taschereau. Nous, on est la Croix-Rouge. La dignité humaine des gens que l'on aide reste prioritaire.»

Qu'est-ce qui l'a le plus marqué depuis trois semaines? Là, ces yeux s'embrument, le «moton» dans la gorge hachure ses mots.

«Le troisième soir après le tremblement de terre, une mère est arrivée ici dans la boîte d'une camionnette avec son bébé de 5 mois vraiment mal en point. J'étais seul avec eux, j'appelais mes collègues sur le talkie-walkie... Tout à coup, toute notre équipe s'est mise en action. C'était comme un mini-Haïti, concentré dans ce petit bébé.»

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