Les milliers de tentes qui attendent d'être montées à Port-au-Prince deviendront vite inadéquates. À l'approche de la saison des pluies, qui sera suivie par celle des ouragans, les Haïtiens qui ont perdu leur maison dans le tremblement de terre du 12 janvier ont besoin d'un abri temporaire beaucoup plus solide.

Ce constat est au coeur des discussions que tiennent les représentants de 27 sections de la Croix-Rouge, réunis pour deux jours à Montréal à l'occasion d'un sommet sur l'aide humanitaire à Haïti.

 

En continuant à mettre l'accent sur la livraison de tentes aux dépens de structures plus solides, «on risque de travailler beaucoup pour un laps de temps très court», note Michaële Amédée Gédéon, présidente de la Croix-Rouge haïtienne, qui participe à la rencontre montréalaise.

«Il faut entreprendre d'urgence la construction d'abris semi-temporaires qui pourront résister à la prochaine saison cyclonique», souligne-t-elle.

La saison des cyclones commence habituellement au début du mois de juin. Mais la pluie, elle, s'abat sur Haïti dès la fin du mois de février. Déjà, depuis quelques jours, il y a des averses dans certaines régions d'Haïti. Pour l'instant, elles ont épargné la capitale, où plus d'un demi-million de personnes vivotent toujours dans des camps insalubres. Mais pour l'instant seulement.

L'érection d'abris plus résistants est l'un des principaux enjeux de la réunion de Montréal, souligne Conrad Sauvé, secrétaire général de la Croix-Rouge canadienne. «Nous avons une très grande préoccupation face à la période des pluies», précise-t-il.

Son collègue Jean-Pierre Taschereau, chef d'équipe de la Croix-Rouge internationale, tout juste rentré d'Haïti, ajoute qu'il ne suffira pas d'offrir des constructions un peu plus solides pour protéger les sinistrés contre les pluies et les ouragans. Il faudra aussi aménager les camps de sans-abri en y creusant des tranchées pour évacuer l'eau de pluie et les reflux sanitaires.

Ce n'est d'ailleurs pas évident d'installer des tentes dans les camps bondés de Port-au-Prince: «Il n'y a même pas assez de place pour les fixer avec des tendeurs», note Jean-Pierre Taschereau.

À l'approche des pluies, il faut donc aussi désengorger les camps surpeuplés en déplaçant les sinistrés vers de nouveaux terrains, si possible à l'extérieur de la capitale. La Croix-Rouge vient d'en aménager un sur la route de l'aéroport, à Port-au-Prince.

Le Centre d'étude et de coopération internationale (CECI), qui vient d'acheminer 350 tentes en Haïti, voit lui aussi avec appréhension l'arrivée prochaine de la saison des pluies.

«Nous avons besoin d'abris semi-temporaires», souligne Carine Guidicelli, porte-parole de l'organisme. Le CECI s'apprête à livrer en Haïti des pièces de bois et de métal destinés à être assemblées en abris, sur place, par de la main-d'oeuvre locale.

Habitations plus solides

Les premiers kits seront envoyés sous peu par bateau, mais toute cette opération va prendre du temps. Et en attendant, les tentes demeurent utiles, précise Mme Guidicelli.

L'ONU est elle aussi engagée dans une course contre la montre pour protéger les sinistrés contre les précipitations imminentes. «Nous envisageons désormais la mise en place de structures résistantes aux ouragans», a annoncé cette semaine la représentante spéciale adjointe de la MINUSTAH, la Mission de stabilisation des Nations unies en Haïti.

Près d'un mois après le séisme, la majorité des sinistrés vivent toujours dans des camps insalubres où l'on craint l'explosion d'épidémies. Les tentes promises par la communauté internationale y sont encore rarissimes. Le ministre du tourisme haïtien, Patrick Delatour, chargé de la reconstruction du pays, a déploré la semaine dernière que son gouvernement n'ait reçu que 4000 des 200 000 tentes promises par la communauté internationale. De son côté, l'ONU a annoncé avoir distribué 10 000 tentes, et en avoir 16 000 autres en réserve.