(Pingtan) L’armée chinoise a affirmé lundi avoir « achevé avec succès » ses manœuvres militaires ayant visé à encercler pendant trois jours l’île autonome de Taiwan, qui a détecté 12 navires de guerre et 91 avions au dernier jour de l’opération.

Du 8 au 10 avril, le commandement militaire chinois « a accompli avec succès diverses tâches » de préparation militaire « autour de l’île de Taiwan, revendiquée par Pékin comme une province chinoise, avec l’exercice “Joint Sword” », a indiqué l’armée.

Il a « testé de manière approfondie sa capacité de combat » interarmées « en conditions réelles », a ajouté le commandement chinois, précisant « être prêt pour le combat, à n’importe quel moment, et résolu à écraser toute forme de séparatisme pour l’indépendance de Taiwan et tentatives d’interférences étrangères ».

Dénoncées par Taiwan et les États-Unis qui ont appelé à la « retenue » tout en déployant un destroyer dans des eaux revendiquées par Pékin, ces manœuvres ont reçu lundi le soutien de la Russie.

« La Chine a le droit souverain de réagir [aux] actions provocatrices » des États-Unis, « notamment en conduisant des manœuvres », a déclaré le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.

« Les tensions sont clairement fortes en ce moment », a réagi à Washington le porte-parole du Conseil de sécurité nationale, John Kirby, en ajoutant que le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken réfléchissait à « reprendre un avion pour Pékin » et que la Chine discutait de possibles visites d’autres responsables américains.

M. Blinken se rendra en fin de semaine au Vietnam, pays voisin de la Chine, pour y aborder « notre vision partagée d’une région indopacifique qui soit prospère, pacifique et résiliente », a aussi annoncé le département d’État.

Débutées samedi, les manœuvres chinoises visaient à protester contre une rencontre mercredi de la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen avec le président de la Chambre américaine des représentants, Kevin McCarthy.  

PHOTO FOURNIE PAR LA PRÉSIDENCE TAÏWANAISE VIA REUTERS

La présidente taïwanaise Tsai Ing-wen

Elles « servent de sérieux avertissement contre la collusion entre les forces séparatistes recherchant “l’indépendance de Taiwan” et les forces extérieures, ainsi que leurs activités provocatrices », avait averti un porte-parole de l’armée chinoise, Shi Yi.  

« Blocus aérien »

L’objectif était de simuler un « bouclage » du territoire de 23 millions d’habitants, a expliqué l’armée chinoise. Et notamment un « blocus aérien », selon la télévision d’État CCTV.

« L’indépendance de Taiwan et la paix et la stabilité dans le détroit de Taiwan s’excluent mutuellement », a déclaré Wang Wenbin, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Après la fin des manœuvres, le ministère des Affaires étrangères de Taiwan a accusé la Chine d’avoir sapé « la paix et la stabilité » dans la région.

Le commandement du théâtre d’opérations Est de l’Armée chinoise a précisé que le Shandong, l’un des deux porte-avions de la Chine, avait « participé à l’exercice du jour ».

Des avions de chasse et des navires de guerre ont simulé des bombardements ciblés contre l’île.

PHOTO FOURNIE PAR CCTV VIA ASSOCIATED PRESS

Sur cette image tirée d’une vidéo diffusée le 8 avril par la télévision chinoise CCTV, deux avions de chasse chinois effectuent une manœuvre de ravitaillement en vol à un endroit non spécifié.

Taipei a annoncé que 12 navires de guerre avaient été détectés lundi à 18 h (6 h heure de l’Est) autour de l’île. « L’armée ne relâchera jamais ses efforts pour renforcer sa préparation au combat », a assuré le ministère de la Défense taïwanais.

Missiles « verrouillés »

Les États-Unis ont semblé eux aussi vouloir faire une démonstration de force : le destroyer américain USS Milius a mené lundi une « opération de liberté de navigation » dans un secteur de mer de Chine méridionale revendiqué par Pékin. Une « intrusion » immédiatement dénoncée par la Chine.

Le Japon a indiqué avoir fait décoller ces derniers jours des avions de chasse en réponse à ceux ayant décollé et atterri du porte-avions Shandong.  

Sur une vidéo publiée lundi sur le compte WeChat du commandement du théâtre d’opérations Est de l’Armée, un pilote chinois dit être « arrivé près de la partie nord de l’île de Taiwan » avec des missiles « verrouillés en place ».

Dans une autre vidéo, accompagnée d’une musique dramatique, le coup de sifflet d’un officier fait courir le personnel militaire en position tandis qu’un barrage simulé sur Taiwan apparaît à l’écran.

De quoi inquiéter la population : « Nous, les gens ordinaires, on veut juste une vie simple et stable », confie à l’AFP Lin Ke-qiang, habitant de 60 ans de l’île Beigan sur l’archipel de Matsu qui appartient à Taiwan, mais est visible de la côte chinoise.

« Si une guerre arrive, maintenant que leurs missiles sont si avancés, nous n’avons aucune chance de résister, on sera écrasés », ajoute cet homme.

« Avertissement »

La Chine voit avec mécontentement le rapprochement ces dernières années entre les autorités taïwanaises et les États-Unis qui, malgré l’absence de relations officielles, fournissent à l’île un soutien militaire substantiel.

Elle considère Taiwan comme une province qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. Pékin vise cette réunification par la force si nécessaire.

Le dernier déploiement important autour de l’île avait eu lieu en août : la Chine avait engagé des manœuvres militaires sans précédent autour de Taiwan et tiré des missiles en réponse à une visite sur l’île de la démocrate Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre américaine des représentants.