(Séoul) La Corée du Nord a tiré jeudi un « nouveau type » de missile balistique, possiblement à combustible solide selon l’armée sud-coréenne, ce qui marquerait une avancée technologique et stratégique majeure pour le programme d’armement de Pyongyang.

Ce tir a déclenché une brève alerte dans l’île nipponne de Hokkaido avant que le Japon ne précise que le projectile n’avait pas frappé son territoire.

« La Corée du Nord semble avoir lancé un nouveau type de missile balistique, possiblement à combustible solide », a expliqué à l’AFP l’état-major interarmées sud-coréen.

Tous les missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) lancés jusqu’à présent par la Corée du Nord étaient à combustible liquide. Or les missiles à combustible solide, que Pyongyang cherche depuis longtemps à mettre au point, sont plus stables et plus rapides à préparer pour un lancement que ceux à combustible liquide, ce qui peut rendre plus difficile leur détection et leur destruction par les forces américaines.

Lors d’un défilé militaire à Pyongyang en février, la Corée du Nord avait exhibé un nombre record de missiles, y compris ce que les analystes considèrent comme un nouvel ICBM à propergol solide.

Lancé jeudi à 7 h 23 (18 h 23 heure de l’Est), le missile a suivi une trajectoire lobée et « a parcouru 1000 km avant d’atterrir en mer de l’Est », le nom coréen de la mer du Japon, a déclaré l’armée sud-coréenne.

« Violation éhontée »

Le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres a appelé Pyongyang à « rouvrir les canaux de communication et à reprendre le dialogue » en faveur de la paix et d’une dénucléarisation totale de la péninsule coréenne, dans un communiqué condamnant le lancement.

À Paris, Anne-Claire Legendre, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, a réclamé pour sa part « une réponse ferme et unie de la communauté internationale ».

« Ce lancement constitue une violation éhontée de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, accroît inutilement les tensions et risque de déstabiliser la sécurité dans la région », a dénoncé dans un communiqué Adrienne Watson, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la présidence américaine.

« Les États-Unis prendront toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité du territoire américain et de leurs alliés de République de Corée et du Japon », a-t-elle ajouté.

Pékin a de son côté condamné le rôle « négatif » de Washington, jugé responsable du regain de tensions dans la péninsule.

« L’impact négatif du précédent exercice militaire des États-Unis et le déploiement d’armes stratégiques autour de la péninsule (coréenne) sont évidents pour tous », a affirmé à la presse Wang Wenbin, un porte-parole de la diplomatie chinoise, appelant toutes les parties à « rester calmes et faire preuve de retenue ».

Le tir est en train d’être analysé, selon l’état-major sud-coréen.

Il est survenu alors que deux réunions des pays du G7 sont prévues dans les prochains jours au Japon : une rencontre des ministres de l’Environnement à Hokkaido samedi et dimanche, et une des ministres des Affaires étrangères dimanche et lundi à Karuizawa (centre), avant le Sommet du G7 prévu en mai à Hiroshima.

« Tsunami radioactif »

Lundi, le leader nord-coréen Kim Jong-un avait appelé à accroître les capacités de son pays en matière de dissuasion pour contrer « l’escalade des manœuvres des impérialistes américains et des traîtres, pantins sud-coréens pour déclencher une guerre d’agression », selon l’agence de presse officielle KCNA.  

Depuis le 23 mars, Pyongyang a notamment affirmé avoir mené trois tests d’un « drone sous-marin d’attaque nucléaire » capable de « produire un tsunami radioactif de grande ampleur ». Ces engins sont connus sous le nom de « Haeil », qui signifie tsunami en coréen.

Le régime a également dit avoir procédé au lancement d’un ICBM le 16 mars.

L’an passé, la Corée du Nord s’est déclarée puissance nucléaire « irréversible », enterrant ainsi toute possibilité de négociation sur sa dénucléarisation.

Aussi en mars, Kim Jong-un a ordonné à ses troupes d’intensifier leurs exercices en vue d’une « guerre réelle ». Washington et Séoul ont répondu avec de nouvelles manœuvres militaires conjointes, impliquant des aéronefs furtifs américains.

Pyongyang considère ces exercices comme des répétitions en vue d’une invasion de son territoire et les a qualifiés mardi d’« hystériques », « simulant une guerre totale contre » la Corée du Nord.

Mardi, la Corée du Sud a accusé Pyongyang d’être « irresponsable » après qu’il a coupé les communications avec Séoul la semaine dernière.

Les militaires du Nord et du Sud communiquent deux fois par jour au moyen d’une ligne spécifique, mais la Corée du Nord ne répond plus aux appels depuis le 7 avril, selon le ministère sud-coréen de l’Unification.

« Kim Jong-un n’a pas encore fini de démontrer ses capacités de lancement nucléaire », analyse Leif-Eric Easley, professeur à l’université Ewha de Séoul.

Et « comme les Nord-Coréens ne répondent littéralement plus au téléphone, l’absence […] de diplomatie accroît le risque d’une escalade involontaire ».