(Séoul) Flanqué de hauts responsables russe et chinois, Kim Jong-un a supervisé un défilé militaire jeudi soir en Corée du Nord, présentant de nouveaux drones et missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) à capacité nucléaire, ont rapporté vendredi les médias d’État.

Au moins quatre nouveaux drones militaires nord-coréens ont été remorqués sur la place Kim Il-sung à Pyongyang, survolée par un autre, à l’occasion du 70e anniversaire de l’armistice qui a mis fin aux combats de la guerre de Corée (1950-1953). Une date célébrée en Corée du Nord comme « le jour de la Victoire ». Les deux Corées sont toujours officiellement en guerre.

Debout entre le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou et le membre du Bureau politique du parti communiste chinois Li Hongzhong – ses premiers invités étrangers répertoriés depuis la pandémie de COVID-19 –, le dirigeant nord-coréen a salué le défilé, tout sourire.

Des milliers de soldats ont marché derrière les plus puissants ICBM du pays, frappés d’interdiction par des sanctions de l’ONU.

M. Kim a « envoyé une chaleureuse salutation de combat » durant le défilé, mais n’a pas prononcé de discours, selon l’agence officielle Korean Central News Agency (KCNA).

Quand et comment

Le ministre nord-coréen de la Défense Kang Sun Nam a déclaré que les États-Unis n’avaient aucune chance « de survie au cas où ils utiliseraient des armes nucléaires contre la RPDC », (République populaire et démocratique de Corée, nom officiel de la Corée du Nord).

« La question n’est pas de savoir si une guerre nucléaire va survenir dans la péninsule coréenne, mais plutôt qui en prendra l’initiative, quand et comment », a ajouté le ministre selon l’enregistrement de son discours sur KCTV.

Pyongyang s’en prend régulièrement aux déploiements des États-Unis dans la péninsule. M. Kang a averti que le Nord agirait « s’ils tentent une confrontation militaire comme en ce moment ».

Le défilé a montré une série de nouvelles armes dont plusieurs ont été dévoilées à une exposition de matériel de défense mercredi à Pyongyang visitée par MM. Kim et Choïgou.

Le nouveau drone sous-marin d’attaque nucléaire, nommé « Haeil » (« tsunami » en coréen), est apparu en public pour la première fois, selon le site NK News basé à Séoul.

« L’enthousiasme et la joie du public étaient à leur comble » lorsque le tout dernier ICBM nord-coréen, le Hwasong-18 à combustible solide, testé en avril et en juillet de cette année, a défilé, selon KCNA.  

Selon KCNA, le défilé « a démontré au monde entier la volonté inflexible de tous les soldats et du peuple de créer une nouvelle légende de la victoire dans l’ère Kim Jong-un ».

Des experts ont souligné la présence de responsables chinois et russe à un défilé où Pyongyang exhibait des armes interdites.  

La Chine, principal allié et soutien économique de la Corée du Nord, et la Russie, autre allié historique, font partie des rares nations avec lesquelles Pyongyang entretient des relations amicales.  

« Le message est clair : Kim a le soutien de deux puissants partenaires régionaux », membres du Conseil de sécurité de l’ONU, a écrit sur Twitter (renommé X) l’analyste Ankit Panda basé aux États-Unis.

Yangmo Ku, professeur de sciences politiques à l’université de Norwich (États-Unis), a déclaré à l’AFP que le défilé sert à « promouvoir la légitimité du pouvoir de Kim Jong-un et l’unité interne en cette période économiquement difficile ».

« Nouvelle guerre froide »

Mais la présence d’invités de haut rang venus de Russie et de Chine suggère « l’émergence d’une nouvelle guerre froide autour de la péninsule coréenne », a ajouté M. Ku.

La Chine, elle, a choisi d’envoyer un représentant civil – qui n’a pas visité l’exposition militaire –, a souligné Artyom Lukin, professeur de science politique à la Far Eastern Federal University en Russie. C’est vraisemblablement « un signal délibéré de Moscou sur sa disposition à étendre la coopération militaire avec la Corée du Nord ».

Pour Leif-Eric Easley, professeur à l’université Ewha à Séoul, « la présence de la Chine à un défilé où la Corée du Nord expose des missiles à capacité nucléaire pose de sérieuses questions sur un soutien de Pékin aux menaces de Pyongyang envers la sécurité mondiale ».

M. Kim soutient l’invasion de l’Ukraine par Moscou, notamment en fournissant des fusées et des missiles, selon Washington, ce que Pyongyang dément.

Le président russe Vladimir Poutine a envoyé un discours, lu par M. Choïgou durant son séjour selon KCNA, dans lequel il salue la Corée du Nord pour son « ferme soutien à l’opération militaire spéciale contre l’Ukraine ».

Selon M. Easley, « étant donné les besoins en munitions de la Russe pour sa guerre illégale en Ukraine et la volonté (de M. Kim) de faire personnellement visiter au ministre russe de la Défense une exposition d’armes de Corée du Nord, les pays membres de l’ONU devraient accroître leur vigilance pour surveiller et réprimer les violations des sanctions ».