(Islamabad) L’incapacité de Kaboul à lutter contre les groupes armés qui planifient depuis le sol afghan des attentats au Pakistan explique la décision d’Islamabad d’expulser des centaines de milliers de migrants afghans, a déclaré mercredi le premier ministre pakistanais.

Des Afghans sont impliqués dans des attentats-suicides et affrontements avec les forces de sécurité pakistanaises, a aussi affirmé devant la presse Anwaar-ul-Haq Kakar, en ajoutant que la sécurité au Pakistan s’était fortement détériorée depuis le retour au pouvoir des talibans à Kaboul en août 2021.

Plus de 250 000 personnes ont traversé la frontière du Pakistan vers l’Afghanistan depuis l’ultimatum lancé en octobre aux 1,7 million d’Afghans qui, selon Islamabad, vivaient illégalement dans le pays, pour rentrer volontairement chez eux avant le 1er novembre ou d’être expulsés.

Le Pakistan affirme que la plupart d’entre eux sont partis de leur plein gré, mais Kaboul considère que la majorité a été forcée à quitter le pays.

« La majorité de ces immigrants en situation irrégulière au Pakistan sont d’origine afghane », a indiqué M. Kakar.  

« Une partie significative de ceux qui sont impliqués dans des activités criminelles ou terroristes se trouve parmi ces immigrants en situation irrégulière », a-t-il affirmé.

Les violences ont augmenté de 60 % au Pakistan depuis de la prise de pouvoir des talibans en Afghanistan voisin, a-t-il fait valoir. Au total, 2267 personnes ont été tuées au Pakistan dans des attentats suicides ou des combats entre militants et forces de sécurité depuis août 2021, selon lui.

S’il a imputé la majorité des incidents aux talibans pakistanais du Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP), M. Kakar a expliqué que ce groupe fomentait ses attaques depuis le sol afghan et que des citoyens afghans étaient aussi impliqués.

Ces deux dernières années, « 15 ressortissants afghans ont été impliqués dans des attentats-suicides et, en outre, 64 Afghans ont été tués dans des affrontements avec les forces de sécurité », a-t-il déclaré.

Malgré les plaintes répétées des autorités pakistanaises, aucune action concrète n’a été prise par le gouvernement taliban à Kaboul, a-t-il regretté.

« Dans certains cas, il y a même des preuves de leur soutien à ces terroristes », a-t-il accusé.

Le gouvernement taliban afghan a de nouveau insisté mercredi sur le fait que le sol du pays n’était pas utilisé par des militants pour organiser des attaques contre d’autres pays, et a déclaré que les problèmes de sécurité du Pakistan étaient une affaire intérieure.

« En ce qui concerne les affirmations d’aujourd’hui du premier ministre intérimaire du Pakistan, nous voudrions dire que, de la même manière que l’Émirat islamique veut la paix et la stabilité en Afghanistan, il veut également la paix au Pakistan », a déclaré le porte-parole Zabihullah Mujahid, utilisant le nom officiel des Taliban pour désigner Afghanistan.

« L’Émirat islamique d’Afghanistan n’est pas responsable du maintien de la paix au Pakistan. Il devrait résoudre lui-même ses problèmes intérieurs et ne pas blâmer l’Afghanistan pour ses échecs », a-t-il ajouté.

Des millions d’Afghans ont afflué au Pakistan au cours des dernières décennies, fuyant une série de conflits violents, dont environ 600 000 depuis que les talibans ont renversé le gouvernement soutenu par les États-Unis et imposé leur interprétation dure de la loi islamique.