(Sabang) Plus d’une centaine de réfugiés rohingya ont débarqué samedi sur une île à l’extrémité occidentale de l’Indonésie, ont indiqué des responsables, mais des habitants devenus hostiles après des vagues d’arrivées successives ont menacé de les rejeter à la mer.

Depuis la mi-novembre, ce sont plus de 1000 membres de cette minorité musulmane persécutée en Birmanie qui ont fui leurs camps au Bangladesh pour gagner la province d’Aceh par la mer, soit le plus important mouvement de migration de Rohingya vers l’Indonésie depuis 2015, selon l’agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR).

Le HCR a félicité l’Indonésie pour « cet exemple de solidarité et d’humanité » et appelé d’autres pays de la région à en faire autant.

Mais sur place, l’accueil est rarement bienveillant.

« Quand je suis arrivé, les réfugiés rohingya étaient déjà sur la plage », a expliqué à l’AFP Dofa Fadhli, chef du village de Ie Meulee, sur l’île de Sabang, dans la région d’Aceh.

PHOTO CHAIDEER MAHYUDDIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

« Les Rohingya, 139 au total, dont des enfants et des femmes », ont débarqué dans la nuit, à 2 h 30 locales (14 h 30 heure de l’Est vendredi), a-t-il précisé.

Un jeune Rohingya de 19 ans, Deluarsah, a expliqué que le groupe avait quitté le Bangladesh début novembre, et avait passé plus de 20 jours en mer dans des conditions « très dangereuses », ajoutant qu’il était « heureux » d’être arrivé en Indonésie.

Mais M. Fadhli a expliqué que les habitants de Ie Meulee étaient « fortement opposés à l’arrivée des réfugiés rohingya ». « Si d’ici cet après-midi aucune action n’est entreprise, alors nous ramènerons les réfugiés sur leur bateau », a-t-il ajouté.

« Il y en aura d’autres »

Un représentant du HCR a assuré que l’organisation allait « gérer la situation avec les autorités locales » mais que les réfugiés devraient probablement passer la nuit sur l’île. « Nous faisons tout notre possible pour leur trouver un endroit » où aller, a-t-il ajouté.

Selon des images prises par l’AFP, les réfugiés ont été regroupés sur la plage et sont surveillés par des policiers.

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Des Rohingya se reposent sur une plage de l’île de Sabang, dans la région d’Aceh, le 2 décembre.

Des milliers de Rohingya risquent chaque année leur vie dans des voyages en mer périlleux et coûteux, sur des bateaux souvent en mauvais état, pour tenter de gagner l’Indonésie ou la Malaisie.

Le Bangladesh accueille, le plus souvent dans des camps aux conditions de vie misérables, environ un million de ces Rohingya ayant fui la Birmanie, pays en majorité bouddhiste.

Selon les observateurs, d’autres bateaux ont quitté les côtes du Bangladesh en direction de l’Indonésie malgré la mise en place de patrouilles par la police indonésienne pour les dissuader de rejoindre les côtes, où des habitants ont tenté à plusieurs reprises de repousser les réfugiés à la mer.

Deux bateaux, avec quelque 400 personnes à bord, sont en panne et dérivent en mer d’Andaman. Le HCR a lancé un appel urgent aux pays voisins pour qu’ils « déploient rapidement toutes leurs capacités de recherche et de sauvetage » pour les récupérer.

L’ONG Médecins sans Frontières a également appelé l’Indonésie et la Malaisie à accueillir les réfugiés.

« C’est la saison des bateaux, donc il va en arriver d’autres », a déclaré à l’AFP Paul Brockmann, directeur régional de MSF, à Kuala Lumpur, capitale de la Malaisie.

« Ces gens ne se lancent pas par goût de l’aventure. Ils se lancent dans ces voyages par désespoir, et avec espoir pour l’avenir », a-t-il ajouté.