(Séoul) Le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a lancé de nouvelles menaces de frappes nucléaires contre Séoul et ordonné l’accélération des préparatifs militaires en vue d’une « guerre » qui peut « être déclenchée à tout moment » sur la péninsule, a rapporté dimanche l’agence d’État KCNA.

Le dirigeant a attaqué les États-Unis dans un long discours, au terme d’une réunion de cinq jours du comité central du Parti des travailleurs de Corée, grand-messe de fin d’année qui fixe les orientations stratégiques du pays.

Au cours de cette réunion, le parti au pouvoir a annoncé le lancement de trois nouveaux satellites-espions en 2024, la construction de drones et le développement de capacités de guerre électronique, selon KCNA.

Après deux échecs successifs en mai et en juin, la Corée du Nord a mis en orbite avec succès en novembre son premier satellite d’observation militaire.

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Le Parti des travailleurs de Corée a tenu pendant cinq jours une réunion plénière de son Comité central.

Aide de la Russie

Les services de renseignement sud-coréens estiment que Pyongyang a reçu une aide technologique décisive de la Russie, où Kim Jong-un s’est rendu en septembre et a rencontré le président Vladimir Poutine, pour réussir à mettre en orbite ce satellite, le « Malligyong-1 ».

La Corée du Nord a procédé en 2023 à un nombre record d’essais de missiles balistiques, en violation de nombreuses résolutions de l’ONU le lui interdisant. Elle a gravé dans sa Constitution son statut de puissance nucléaire, et a testé avec succès le Hwasong-18, le missile balistique intercontinental (ICBM) le plus puissant de son arsenal, capable d’atteindre les États-Unis.

Kim Jong-un a accusé dans son discours Washington de « divers types de menaces militaires » et a ordonné à ses forces armées de maintenir « une capacité de réponse écrasante à la guerre », selon KCNA.  

C’est « un fait accompli qu’une guerre peut éclater à tout moment dans la Péninsule coréenne en raison des mouvements imprudents des ennemis visant à nous envahir », a déclaré le dirigeant.

Dans un effort de dissuasion, les forces armées américaines ont envoyé en Corée du Sud ces derniers mois le sous-marin à propulsion nucléaire USS Missouri, le porte-avions USS Ronald Reagan et un bombardier stratégique B-52, provoquant à chaque fois la colère de la Corée du Nord.

La Corée du Nord avait déjà décrit le déploiement d’armes stratégiques par Washington comme une « provocation intentionnelle d’une guerre nucléaire ».

« Nous devons réagir rapidement à une éventuelle crise nucléaire et continuer à accélérer les préparatifs pour pacifier l’ensemble du territoire de la Corée du Sud en mobilisant tous les moyens et forces physiques, y compris la force nucléaire, en cas d’urgence », a déclaré Kim Jong-un.

« Crise persistante et incontrôlable »

Pyongyang voit dans les manœuvres militaires à sa porte comme une répétition d’une future invasion de son territoire, et considère depuis longtemps ses essais de missiles comme des « contre-mesures » nécessaires.

Lors de la réunion du parti, le dirigeant a affirmé ne plus rechercher la réconciliation et à la réunification avec la Corée du Sud, soulignant la « situation de crise persistante et incontrôlable » qui, selon lui, a été déclenchée par Séoul et Washington.

Les deux Corées avaient entamé en 2018 un processus de rapprochement, caractérisé par trois rencontres entre Kim Jong-un et le président sud-coréen de l’époque, Moon Jae-in.

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Kim Jong-un lors du lancement du missile Hwasong-18, le 18 décembre.

Mais les relations entre les deux Corées se sont détériorées jusqu’à atteindre un point bas cette année, après que le lancement d’un satellite-espion par Pyongyang a poussé Séoul à suspendre partiellement un accord militaire de 2018 visant à désamorcer les tensions.

« Je pense que c’est une erreur que nous ne devrions plus commettre de considérer ceux qui nous déclarent comme “ennemi principal” […] comme partenaire pour la réconciliation et l’unification », a déclaré M. Kim, cité par KCNA.

Il a ordonné de ce fait un remaniement des administrations gérant les relations avec le Sud afin de « changer fondamentalement de direction ».

Pour Leif Easley, professeur de relations internationales à l’université Ewha de Séoul, l’accent mis par Pyongyang sur ses « importantes capacités militaires » vise probablement à cacher les difficultés économiques du pays cette année.

« La rhétorique belliqueuse de Pyongyang suggère que ses actions militaires ne visent pas seulement la dissuasion, mais aussi la politique intérieure et la coercition internationale », estime-t-il.