(Séoul) La Corée du Nord a procédé dimanche pour le troisième jour d’affilée, selon Séoul, à des exercices d’artillerie avec des munitions réelles sur sa côte occidentale, près d’îles sud-coréennes dont la population civile a été appelée à se mettre à l’abri.

L’armée sud-coréenne a affirmé que le Nord avait effectué dimanche « des tirs d’artillerie avec plus de 90 obus au nord de l’île de Yeonpyeong de 16 h à 17 h 10 », soit de 4 h à 0 h 10 (heure de l’Est).

« Nous émettons une sévère mise en garde contre les tirs répétés d’artillerie de la Corée du Nord dans la zone où les actes hostiles sont prohibés qui menacent la paix sur la péninsule coréenne et aggravent les tensions », a déclaré l’armée sud-coréenne, exigeant « que cela cesse immédiatement ».

L’armée nord-coréenne a assuré avoir effectué un « entraînement maritime à tirs réels » avec 88 obus, assurant que les manœuvres étaient « sans rapport directionnel » avec la ligne de démarcation maritime.

Les exercices « ne présentaient aucune menace intentionnelle » envers la Corée du Sud et s’inscrivaient dans « le système normal d’entraînement de notre armée », selon un communiqué publié par l’agence nord-coréenne KCNA.

Aucun obus nord-coréen n’est tombé au sud de la « Ligne de limite du nord » (NLL), frontière maritime de facto en mer Jaune, et aucune victime n’a été signalée, selon l’agence sud-coréenne Yonhap.

Les autorités locales de Yeonpyeong ont dit à l’AFP avoir prévenu les habitants de rester chez eux par précaution.

Vendredi et samedi, des tirs nord-coréens avaient déjà visé cette région, l’une des zones tampons créées par un accord de 2018 devenu caduc en novembre après le lancement par Pyongyang d’un satellite-espion.

Vendredi, les habitants de Yeonpyeong et de l’île voisine de Baengnyeong avaient déjà reçu l’ordre d’évacuer vers les abris en raison de tirs d’artillerie nord-coréens dans les eaux environnantes. Plus de 200 obus avaient été tirés, selon Séoul, dont l’armée a riposté par un exercice à munitions réelles quelques heures plus tard à Yeonpyeong.

« Leurre »

Pyongyang avait affirmé que ses tirs constituaient « une réponse naturelle » aux exercices menés par Séoul, Washington et Tokyo dans la région.

Samedi, l’armée sud-coréenne a annoncé que le Nord avait tiré 60 obus près de Yongpyeong. Pyongyang a toutefois apporté une autre version.

Selon Kim Yo Jong, la puissante sœur du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un, il s’agissait de charges explosives simulant le son d’un canon, que les forces nord-coréennes ont fait sauter pour tester la réaction sud-coréenne.

PHOTO KCNA VIA ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Kim Yo Jong, la puissante sœur du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un

« Notre armée n’a pas tiré un seul obus dans l’eau », a affirmé Kim Yo Jong dans un communiqué diffusé dimanche par KCNA.

« Les militaires voyous de la République de Corée ont mordu au leurre que nous avons lancé », s’est-elle réjouie. Avant d’ironiser : « à l’avenir, ils prendront même le grondement du tonnerre dans le ciel du Nord pour un tir d’artillerie ».

Séoul n’a pas réagi à cette affirmation dans l’immédiat.

« Phase de confrontation »

Cette escalade en mer Jaune est une des plus sérieuses depuis 2010, quand le Nord avait bombardé Yeonpyeong faisant quatre morts dont deux civils. Elle survient après une salve de déclarations belliqueuses du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un qui a menacé ces derniers jours d’« anéantir » la Corée du Sud et les États-Unis.

L’île de Yeonpyeong, environ 2000 habitants, est située à 115 km à l’ouest de Séoul et à une dizaine de kilomètres au sud de la côte nord-coréenne. Également très proche de la Corée du Nord, Baengnyeong, 4900 habitants, se trouve à 210 km de Séoul.

Les deux Corées sont toujours techniquement en guerre depuis la fin du conflit en 1953 qui s’est conclu sur un armistice et non un traité de paix. Depuis plus de 70 ans, la péninsule connaît une alternance de périodes d’aggravation des tensions et de relative détente.

Leurs relations sont actuellement au plus bas depuis des décennies.

La Corée du Nord « est entrée dans une phase de confrontation militaire », explique à l’AFP Cho Han-bum, chercheur à l’Institut coréen pour l’Unification nationale.

Elle « ne va pas s’engager dans des provocations explicites comme elle l’avait fait à Yeonpyeong mais va continuer à aggraver les tensions militaires » tout en rendant le Sud responsable.

L’an dernier, la Corée du Nord a inscrit son statut de puissance nucléaire dans sa Constitution et a tiré plusieurs missiles balistiques intercontinentaux, en violation des résolutions de l’ONU.

Fin décembre, Kim Jong-un avait ordonné l’accélération des préparatifs militaires en vue d’une « guerre » pouvant « être déclenchée à tout moment ».