(Séoul) La Corée du Nord a annoncé lundi avoir réussi à tirer un nouveau type de missile balistique équipé d’une ogive hypersonique manœuvrable, une nouvelle avancée technologique en matière d’armement.

Ce tir, le premier d’un missile balistique hypersonique à portée intermédiaire (IRBM) à combustible solide par Pyongyang, a été détecté par l’armée sud-coréenne dimanche après-midi.  

Ce missile à combustible solide était « chargé d’une ogive hypersonique et manœuvrable », selon l’agence de presse d’État nord-coréenne KCNA.

L’essai était destiné à « vérifier les capacités de vol plané et de maniabilité » ainsi que « la fiabilité du nouveau moteur à combustible solide à poussée élevée et à étages multiples nouvellement développés », a expliqué KCNA.

L’agence a affirmé que ce lancement, le premier rapporté par Pyongyang depuis le début de l’année, « n’a jamais affecté la sécurité d’un pays voisin et n’a rien à voir avec la situation régionale ».

PHOTO AHN YOUNG-JOON, ASSOCIATED PRESS

Une télévision diffuse, à Séoul, des images d’archives d’un lancement de missile nord-coréen, le 14 janvier.

Cet essai intervient sur fond d’inquiétudes autour d’un durcissement de la position de Pyongyang.  

La semaine dernière, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a décrit la Corée du Sud comme le « principal ennemi » du pays qu’il n’hésiterait pas à « anéantir ».

Le ministère sud-coréen de la Défense a condamné ce lancement et affirmé qu’il entraînera une « réponse écrasante » en cas de « provocation directe » de Pyongyang.  

« Une provocation claire »

« Ce comportement de la Corée du Nord est une provocation claire qui viole les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies interdisant l’utilisation de la technologie des missiles balistiques, nous lançons une mise en garde sévère et demandons instamment à la Corée du Nord d’arrêter immédiatement », a-t-il ajouté dans un communiqué.

L’Union européenne a pour sa part condamné ce lancement, dans une déclaration du bureau du chef de sa diplomatie, Josep Borrell.

« L’UE appelle la Corée du Nord à cesser toute action illégale qui porte atteinte à la paix et à la sécurité internationales dans sa région et au-delà », précise un communiqué, qui assure que « l’UE est prête à travailler avec tous les partenaires pour promouvoir un processus diplomatique visant à la dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de la péninsule coréenne ».

Les missiles à combustible solide sont plus faciles à dissimuler et plus rapides à lancer tandis que les missiles hypersoniques peuvent en général être manœuvrés en vol, afin de mieux atteindre leurs cibles.  

Ces deux technologies figurent depuis longtemps sur la liste des technologies d’armement que souhaite posséder M. Kim.

« La Corée du Nord semble poursuivre simultanément le développement de missiles hypersoniques et de missiles balistiques à portée intermédiaire (IRBM) utilisant des propulseurs à carburant solide », a affirmé Chang Young-keun, expert en missiles à l’Institut coréen de recherche sur la stratégie nationale.  

« Les missiles hypersoniques de moyenne ou longue portée seront particulièrement utiles pour frapper Guam tout en échappant au système de défense antimissile américain », a-t-il ajouté, en référence à l’île du Pacifique où les États-Unis abritent une importante base militaire.

Mi-décembre, le dirigeant nord-coréen avait supervisé le tir d’un Hwasong-18, missile balistique intercontinental (ICBM) à combustible solide, tiré dans la mer du Japon, une zone également connue sous le nom de mer de l’Est.

KCNA a publié lundi une photo du lancement du missile pour accompagner l’information sans mentionner la présence de M. Kim à cette occasion.  

Ankit Panda, un analyste basé aux États-Unis, a déclaré au site spécialisé NK News que l’image suggérait que le missile était doté d’un « véhicule de rentrée manœuvrable [MaRV] », c’est-à-dire dont l’ogive est capable de suivre des cibles au sol.

Armes plus précises

Pyongyang tente de mettre au point des armes plus précises et capables de « mieux pénétrer les défenses antimissiles », a-t-il ajouté.

Le tir de dimanche intervient après des exercices d’artillerie par la Corée du Nord début janvier avec des munitions réelles sur sa côte occidentale, près d’îles sud-coréennes dont la population civile a été appelée à se mettre à l’abri.

Les relations entre les deux Corées sont actuellement au plus bas depuis des décennies.

Fin décembre, M. Kim a ordonné l’accélération des préparatifs militaires en vue d’une « guerre » pouvant « être déclenchée à tout moment ». Il a dénoncé une « situation de crise persistante et incontrôlable », selon lui déclenchée par Séoul et Washington avec leurs exercices militaires conjoints dans la région.

Pyongyang a réussi l’année dernière à mettre en orbite sur satellite-espion, après avoir reçu, selon la Corée du Sud, une aide technologique russe, en échange de livraisons d’armes pour la guerre que mène Moscou en Ukraine.

La Russie et la Corée du Nord, alliés de longue date, affichent un rapprochement depuis le voyage du dirigeant nord-coréen dans l’Extrême-Orient russe en septembre 2023 pour rencontrer le président russe Vladimir Poutine.  

PHOTO KCNA, ARCHIVES REUTERS

Rencontre entre Vladimir Poutine et Kim Jong-un en septembre 2023.

L’an dernier, la Corée du Nord a inscrit son statut de puissance nucléaire dans sa Constitution et tiré plusieurs missiles balistiques intercontinentaux, en violation des résolutions de l’ONU.