(Islamabad) Les deux partis pakistanais qui s’étaient unis pour évincer Imran Khan du poste de premier ministre en 2022 ont annoncé mardi un accord pour gouverner ensemble, alors que les élections du 8 février n’avaient dégagé aucun vainqueur clair.

La Ligue musulmane du Pakistan (PML-N) de Nawaz Sharif, réputée être soutenue par l’armée, va faire coalition avec le Parti du peuple pakistanais (PPP) de Bilawal Bhutto Zardari, et une poignée de petits partis.

« Les partis présents ici représentent près des deux tiers de la Chambre élue », a déclaré Shehbaz Sharif, le président du PML-N et frère de Nawaz, aux côtés des dirigeants du PPP et de deux autres groupes.

L’annonce a été le point culminant d’une journée de négociations en coulisses et à rebondissements, le PPP ayant démenti un temps être prêt à s’unir au PML-N, peut-être pour faire monter les enchères.  

La coalition se fait donc sans les partisans d’Imran Khan, pourtant arrivés en tête du scrutin (90 sièges sur les 266 en jeu), alors que son parti le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI) avait subi une répression ayant contraint ses candidats à se présenter en indépendants.

Dans son discours, Shehbaz Sharif leur a néanmoins tendu la main, disant la coalition prête à discuter avec Imran Khan pour inclure le PTI dans le prochain gouvernement.  

« Oubliez et pardonnez, pardonnez et oubliez. Venez, unissons-nous pour le bien du pays », a-t-il déclaré. « Sacrifiez vos intérêts personnels, mettez de côté la question de l’ego ».

Mais plus tôt, Imran Khan, actuellement emprisonné, avait lui écarté toute participation du PTI à une coalition.  

« Nous ne siégerons ni avec le PML-N ni avec le PPP », a-t-il déclaré à quelques journalistes lors d’une audience de procédure dans la prison d’Adiala, près d’Islamabad, où il est incarcéré quasiment depuis son arrestation en août.

Questions encore sans réponses

La conférence de presse du PML-N et du PPP a laissé nombre de questions sans réponses, en particulier les détenteurs des principaux maroquins du futur gouvernement, ce qui laisse augurer encore de longues tractations.  

Shehbaz Sharif, premier ministre du dernier gouvernement avant la dissolution de l’Assemblée, a dit souhaiter que son frère aîné Nawaz, trois fois premier ministre, revienne au pouvoir.

Mais le principal porte-parole du PML-N, Marriyum Aurangzeb, a déclaré plus tard sur X que le jeune Sharif dirigerait l’exécutif.

« Nous avons décidé aujourd’hui de nous réunir et de former un gouvernement pour sortir le Pakistan des difficultés », a dit pour sa part pendant la conférence de presse Asif Ali Zardari, coprésident du PPP et ancien président du Pakistan.

Son fils Bilawal Bhutto Zardari avait lui déclaré plus tôt qu’il verrait bien son père redevenir président, ce qui pourrait être un des éléments des négociations à venir.

De multiples soupçons de manipulation ont accompagné les élections législatives et provinciales du 8 février, notamment du fait de la coupure des services de téléphonie et de l’internet mobiles le jour du scrutin, et de la lenteur du décompte des résultats.

« Nous allons contester le trucage des élections devant la Cour suprême du Pakistan et nous examinerons l’alliance plus tard », a déclaré Imran Khan mardi.

Son parti affirme qu’il aurait remporté encore plus de sièges sans ces fraudes présumées.

L’ancien joueur vedette de cricket n’a pas pu se présenter le 8 février, car il a été condamné peu avant à de longues peines de prison pour trahison, corruption et mariage non islamique.

Après son éviction en 2022, il a défié de front l’armée, qui a dirigé le pays pendant des décennies et était pourtant présumée l’avoir soutenu lors de son élection en 2018.  

Il l’a accusée d’avoir orchestré sa chute et lui a attribué ses ennuis judiciaires, destinés selon lui à l’empêcher de revenir au pouvoir.