Environ 200 000 civils tamouls du Sri Lanka ont échappé au cauchemar de la zone de guerre, mais ces réfugiés blessés et traumatisés s'entassent maintenant dans des camps aux conditions sanitaires et alimentaires déplorables.

Le responsable des Affaires humanitaires aux Nations unies, John Holmes et le ministre britannique pour le Développement international, Mike Foster, ont pu se rendre jeudi à Vavuniya -à 80 km au sud-ouest de la zone du conflit- dans ce que Colombo appelle des «villages de secours» et que les rebelles tamouls surnomment des «camps de concentration».

Ces «camps débordent avec 200 000 personnes qui ont fui les combats, beaucoup étant dans un état critique, sachant que davantage de gens devraient arriver bientôt», s'est alarmé M. Holmes.

«Il est clair que les infrastructures actuelles pour ceux qui ont réchappé de la guerre ne permettent pas de gérer autant de monde», a renchéri M. Foster.

Ces responsables doivent être suivis mercredi à Vavuniya par les ministres britannique et français des Affaires étrangères, David Miliband et Bernard Kouchner.

Depuis le début, le 20 avril, d'un exode massif de Tamouls, l'ONU pense que plus de 100 000 civils ont quitté la zone de guerre et qu'il en reste 50 000 retenus par les Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE) sur une bande côtière de six km2.

L'armée affirme avoir «sauvé» 113 000 personnes en une semaine grâce à «la plus grande opération de libération d'otages dans l'Histoire». Beaucoup d'entre eux sont déjà à Vavuniya, s'ajoutant à ceux arrivés depuis 2007.

«Ce nouvel afflux requiert tout type d'assistance: nourriture, eau, abris, soins et structures sanitaires», a prévenu M. Foster.

D'après l'organisation Médecins Sans Frontières (MSF), l'hôpital public de Vavuniya est «débordé» par l'afflux de blessés par balles ou par explosions.

«Il y a tout simplement trop de gens pour que nous les soignions tous (...) et pas assez d'infirmières. Nous ne sommes pas en mesure de sauver tout le monde», a averti le chirurgien britannique Paul McMasters, cité par MSF qui emploie le médecin sur place.

«Les autobus déchargent des cadavres, parce que des gens succombent en chemin», a témoigné une aide soignante, Karen Stewart, citée par le communiqué de MSF.

Les blessures sont aussi psychologiques.

Une femme a raconté à une équipe de télévision britannique accompagnant le ministre Foster n'avoir «aucune idée du sort de son fils» interpellé par l'armée sur la route de Vavuniya.

«Les gens que j'ai vus, dont certains proches sont blessés ou portés disparus, m'ont dit avoir eu peur de fuir (la zone de guerre) par crainte d'être abattus» par les Tigres, a rapporté M. Foster.

Les très rares réfugiés, qui ont témoigné directement auprès de la presse ces derniers jours, ont affirmé que les deux belligérants leur «tiraient dessus».

Le Sri Lanka empêche au maximum l'accès de journalistes à Vavuniya et verrouille complètement la zone de guerre, même pour les organisations humanitaires, à l'exception du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

Même M. Holmes n'a pas obtenu lundi le droit de pouvoir y faire entrer une équipe humanitaire de l'ONU.

Une quarantaine de journalistes avaient été emmenés vendredi par l'armée en lisière du théâtre des opérations militaires.

Mais pas question d'approcher les milliers de femmes, enfants, hommes et vieillards tout juste sortis de l'enclave des Tigres et qui s'entassaient dans des champs.

«Nous n'empêchons personne de leur parler. Mais ces gens n'ont pas été inspectés et peuvent être dangereux», avait expliqué à l'AFP le porte-parole des forces armées, le général Udaya Nanayakkara.