Le bilan des émeutes ethniques au Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine, s'est alourdi avec au moins 156 personnes tuées et plus d'un millier de blessés, selon un bilan officiel.

Ces incidents sont les plus meurtriers depuis des décennies dans cette région majoritairement peuplée de musulmans, située à l'extrême nord-ouest de la Chine, aux confins de l'Asie centrale.

Après Urumqi, la capitale régionale, les violences ont semblé faire tache d'huile avec l'annonce dans la nuit de lundi à mardi par l'agence officielle Chine nouvelle de la dispersion par la police de «plus de 200 émeutiers» à Kashgar, la deuxième ville du Xinjiang, une «région autonome».

La dispersion a eu lieu lundi vers 18h00 heure locale, alors que les émeutiers tentaient de se rassembler devant la principale mosquée de la ville, a ajouté l'agence sans autre précision.

Les violences à Urumqi ont fait 156 morts et 1.080 blessés, selon un nouveau bilan officiel diffusé dans la nuit de lundi à mardi par Chine nouvelle, citant les autorités de police régionales. Le précédent bilan était de 140 morts et 828 blessés.

Le nombre de personnes arrêtées s'élèverait à plus de 700, selon l'agence.

Parmi elles se trouvent «plus de dix personnalités clef qui ont attisé les troubles», selon la police chinoise citée par Chine Nouvelle.

Un responsable du Parti communiste chinois (PCC, parti unique) au Xinjiang, Lu Yi, a précisé que sur les 156 tués, 129 étaient des hommes et 27 des femmes.

L'origine ethnique des victimes n'est pas précisée.

Ces violences gravissimes, orchestrées, selon Pékin, par la dissidence ouïghoure en exil, ont entraîné un net renforcement de la sécurité dans la région autonome.

Sa capitale Urumqi s'est embrasée dimanche soir quand des milliers d'émeutiers sont descendus dans les rues et ont attaqué des Hans, l'ethnie majoritaire en Chine, selon les témoignages d'habitants.

La télévision chinoise a montré des blessés couverts de sang, des carcasses de véhicules incendiés et des foules jetant des pierres sur les forces de l'ordre ou retournant des voitures de police.

Mais des groupes exilés ouïghours ont affirmé que les forces de l'ordre avaient tiré sur des manifestants pacifiques.

Le Xinjiang, peuplé notamment de 8,3 millions d'Ouïghours, des musulmans turcophones, est régulièrement la proie de troubles séparatistes.

«Le Xinjiang prendra les mesures les plus fortes pour empêcher la situation de s'étendre à d'autres régions et pour préserver la stabilité», a dit lundi Nur Bekri, le président de région, dans un discours musclé.

Cette vaste région aride constitue l'une des deux zones, avec le Tibet, où Pékin redoute particulièrement l'instabilité.

A Lhassa, capitale régionale du Tibet, des émeutes en mars 2008 avaient fait, selon les autorités, 18 morts civils et un policier.

«Les forces de sécurité et la police armée doivent renforcer leur contrôle sur Urumqi et la poursuite des éléments criminels, et traiter fermement et résolument les nouveaux actes de destruction», a-t-il ajouté.

Urumqi, où la présence des forces de l'ordre était massive lundi, présentait l'allure d'une ville morte, avec les commerces fermés et un couvre-feu prévu en soirée, selon l'un des journalistes de l'AFP sur place.

Près du grand marché, des forces de l'ordre casquées, munies de boucliers et de matraques, stationnaient à chaque coin de rue, a constaté l'AFP.

Des véhicules patrouillaient les rues bordées de bon nombre d'échoppes closes. «Les boutiquiers ont peur», a expliqué une propriétaire de bar han.

L'internet a été interrompu et les communications mobiles également, ont indiqué des résidents.

Le gouvernement régional a accusé le Congrès mondial ouïghour, dirigé par la dissidente en exil Rebiya Kadeer, d'avoir excité ses sympathisants à la violence par des appels sur l'internet.

Interrogé sur ces troubles, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a estimé à Genève que «tous les différends, qu'ils soient à l'intérieur (d'un pays) ou au niveau international, doivent se résoudre pacifiquement par le dialogue».

A Washington, un porte-parole du département d'Etat, Ian Kelly, a appelé «toutes les parties au calme et à la retenue», regrettant «profondément» les «pertes humaines».