Un personnage important du bouddhisme tibétain est sorti de l'ombre au cours des derniers jours. Les premiers pas politiques du panchen-lama - plus important personnage religieux présent au Tibet depuis l'exil du dalaï-lama - ont été célébrés partout en Chine communiste... mais sûrement pas au Tibet.

Gyeltsen Norbu, 20 ans, a été désigné par la Chine en 1995 comme le 11e panchen-lama, réincarnation du dernier panchen-lama mort en 1989. Peu auparavant, le dalaï-lama avait pourtant désigné un autre garçon du nord du Tibet, Gedün Chökyi Nyima, comme réincarnation du panchen-lama. Ulcérée, la Chine a fait disparaître le garçon de 5 ans et sa famille, puis nommé Gyeltsen Norbu, fils de membres du Parti communiste, nouveau panchen-lama.

 

Le panchen-lama n'a pas de fonction politique, mais jouit d'un grand prestige et d'influence. Il fait partie de ceux qui désigneront le futur dalaï-lama.

Ce mois-ci, le jeune homme a fait ses débuts politiques à l'occasion de la Conférence annuelle consultative politique du peuple chinois, instance qui conseille le Parti communiste au pouvoir. Il a été fait délégué de la Conférence plutôt que vice-président, comme s'y attendaient pourtant les experts.

Où est Gedün Chökyi Nyima?

Slon Dermod Travis, directeur du Comité Canada-Tibet, la manoeuvre ne vise qu'à «donner une crédibilité à quelqu'un qu'ils ont choisi eux-mêmes». «Mais je pense que les Tibétains sont assez intelligents pour reconnaître un imposteur à la solde du gouvernement quand ils en voient un.»

Le 25 avril, les Tibétains souligneront l'anniversaire du panchen-lama «légitime», qui n'a pas été revu depuis la disparition de sa famille en 1995. Le gouverneur du Tibet a affirmé dernièrement que Gedün Chökyi Nyima vit au Tibet, où «ses frères et soeurs vont à l'université ou travaillent». «À ce que je sache, sa famille et lui vivent une bonne vie au Tibet. Ils ne veulent pas être dérangés. Ils veulent vivre une vie normale.»

Des affirmations difficiles à vérifier. Mais selon le tibétologue Robert Barnett, de l'Université Columbia de New York, le jeune homme serait bien vivant. «La Chine semble éviter de créer le genre de catastrophe que ça créerait si une personne aussi célèbre était tuée», a-t-il expliqué à La Presse cette semaine. «Je doute aussi qu'il soit en prison. C'est une personne que la Chine doit garder cachée.»

Les deux panchen-lamas faisaient partie du même groupe d'enfants sélectionnés par les moines tibétains pour désigner la réincarnation du 10e panchen-lama, dit M. Barnett. Aujourd'hui, indique le professeur, tout ce que les Tibétains attendent de celui que Pékin a désigné, «c'est qu'il puisse parler de lui-même pour dire comment tout cela n'est qu'une pièce de théâtre».

La controverse autour du panchen-lama soulève évidemment des questions sur la réincarnation du dalaï-lama après sa mort. Le chef spirituel tibétain a maintenant 74 ans et a déjà annoncé que sa réincarnation se ferait hors de Chine. Pékin a cependant voté une loi qui stipule que le dalaï-lama doit être chinois. «Chose certaine, chez les Tibétains, on ne répétera sûrement pas la même erreur que pour la désignation du panchen-lama, dit Robert Barnett. L'enfant désigné comme étant la réincarnation du dalaï-lama ne sera pas publiquement présenté tant qu'il ne sera pas en sécurité.»

Avec Asia Times Online