Le premier ministre thaïlandais, Abhisit Vejjajiva, a déclaré samedi qu'il serait «difficile» d'organiser des élections anticipées avant la fin de l'année, tandis que le couvre-feu nocturne, imposé il y a dix jours après les violences meurtrières à Bangkok, a été levé.

Le départ du premier ministre et l'organisation de législatives anticipées est la principale revendication des «chemises rouges» qui ont manifesté pendant des semaines à Bangkok avant d'être dispersées par la force le 19 mai.

«Je n'ai pas exclu des élections anticipées», a déclaré Abhisit devant la presse étrangère. Mais, a-t-il ajouté, «de façon évidente, il est désormais beaucoup plus difficile d'organiser des élections avant la fin de l'année».

Début mai, lors de négociations avec ses opposants, Abhisit avait proposé une «feuille de route» prévoyant un scrutin le 14 novembre. Mais il avait annulé sa proposition devant le refus des «chemises rouges» de se disperser. «La date de novembre avait été proposée dans (l'idée) que les manifestants acceptaient le plan dès le départ», a-t-il fait valoir samedi.

Abhisit avait pris la tête du gouvernement en décembre 2008, à la faveur d'une décision de justice et d'un renversement d'alliances au Parlement. Il peut, s'il le veut, ne pas convoquer d'élections avant fin 2011.

Cependant, il a déclaré samedi que si toutes les parties impliquées dans cette crise -y compris les «chemises rouges»- optaient pour le processus de paix et qu'au cours des prochains mois le gouvernement et le Parlement fonctionnaient bien «alors ce serait le bon moment» pour convoquer les électeurs.

Les «chemises rouges» réclament le retour à l'ordre constitutionnel qui prévalait avant le putsch ayant renversé en 2006 l'ex-premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, qui était à la tête du gouvernement depuis 2001. Elles dénient toute légitimité à Abhisit qui n'est pas arrivé au pouvoir à l'issue d'un vote.

Entre le début des manifestations mi-mars et la dispersion par la force du mouvement, au moins 88 personnes ont été tuées et 1900 blessées, dont plusieurs pendant les émeutes qui ont suivi la reddition des leaders «rouges».

Des voix ont exprimé leur inquiétude sur le comportement des forces de sécurité. Abhisit a promis une enquête indépendante sur les événements et «si les conclusions de l'enquête suggèrent que je devrais prendre la responsabilité d'une quelconque décision, je le ferai», a-t-il dit.

Mais il a justifié l'opération menée le 19 mai par les soldats appuyés par de chars et tirant à balles réelles. «Notre politique a toujours été de rechercher une solution pacifique aux problèmes, d'exercer un maximum de retenue», a-t-il assuré.

À l'inverse, le gouvernement reproche à Thaksin d'avoir incité les «rouges» à la violence et d'avoir financé leur mouvement, ce que dément l'intéressé. Le pouvoir a lancé cette semaine un mandat d'arrêt pour «terrorisme» à son encontre.

Le premier ministre l'a aussi accusé samedi d'être responsable de l'échec des négociations avec les manifestants. «Nous avons de bonnes raisons de penser qu'ils n'ont pas été autorisés par l'ancien premier ministre» à accepter la «feuille de route», a-t-il déclaré. Il «a été un obstacle important à beaucoup de compromis et plans de réconciliation et je crois qu'il continuera de l'être».

Alors que cette semaine la vie a repris son cours normal à Bangkok, Abhisit a annoncé que le couvre-feu nocturne était levé «car la situation était sous contrôle».

Après les violences du 19 mai, les autorités avaient imposé cette mesure dans la capitale et dans 23 provinces, notamment dans les régions rurales et pauvres du nord et du nord-est du pays dont sont originaires la plupart des «chemises rouges».

En revanche, l'état d'urgence imposé le 7 avril reste en vigueur.