Les gardes-frontières nord-coréens ont abattu la semaine dernière trois Chinois qui tentaient de pénétrer dans le pays clandestinement pour y vendre des marchandises de contrebande, a révélé mardi la Corée du Nord.

Selon la BBC, la Corée du Nord a indiqué qu'elle punirait les coupables s'il y a lieu. La Chine s'est limitée à une protestation et à une demande d'explication.

 

«C'est vraiment une première pour les deux pays», explique Marcus Noland, spécialiste de la Corée du Nord à l'Institut économique international Peterson de Washington. «La Corée du Nord a toujours fait très attention à ses relations avec son voisin, et la Chine a toujours été très circonspecte dans ses critiques. On ne les voit pas souvent laver leur linge sale en public.»

L'économiste américain ne s'attend toutefois pas à ce que la Chine punisse son alliée. «Tout au plus limitera-t-elle l'entrée des policiers nord-coréens qui traquent les transfuges. Et encore, ce serait une mesure discrète, qui ne serait pas rendue publique. La Chine ne veut pas déstabiliser le pays davantage et donc n'appliquera pas de sanctions économiques. Et elle ne demandera pas quelque chose que Pyongyang ne peut ou ne veut pas lui donner, pour éviter de perdre la face.»

Contrôles

Les deux pays ont resserré les contrôles sur la frontière de 1000 km pour enrayer la contrebande et les défections - 3000 l'an dernier, selon le New York Times. «Il y a beaucoup plus de tours de surveillance, mais la frontière est si vaste qu'il ne peut y avoir de contrôles comme sur la frontière avec la Corée du Sud ou entre les deux Allemagnes avant 1989, dit M. Noland. La Chine considère aussi que la contrebande permet à la population nord-coréenne de subsister avec une économie de marché embryonnaire et que ça stabilise le pays.» Les échanges commerciaux entre les deux pays dépassent le milliard de dollars, et le marché de contrebande pourrait avoir la même valeur, selon un rapport publié en 2008 par l'Institut des États-Unis pour la paix.

La Chine tentera-t-elle de jouer un rôle dans la succession de Kim Jong-il, le dictateur nord-coréen? «Je ne crois pas qu'elle le veuille ni qu'elle en ait les moyens, dit M. Noland. Des rumeurs disent que le fils aîné de Kim Jong-il, Kim Jong-nam, a été écarté de la succession parce qu'il était trop proche de généraux chinois. Et aussi que la récente visite de Kim Jong-il en Chine a été écourtée parce que ses hôtes lui ont suggéré que le successeur qu'il avait choisi, son troisième fils, Kim Jong-un, n'était pas adéquat. Des agents de renseignement américains que j'ai rencontrés m'ont dit qu'il pourrait avoir un trouble de la personnalité limite et qu'il manque totalement d'empathie. Ils ont investi beaucoup de temps et d'efforts pour mieux comprendre Kim Jong-un. Ils ont notamment rencontré presque tous ses anciens camarades de classe au lycée privé suisse qu'il a fréquenté.»