Le chef spirituel des Tibétains en exil, le dalaï-lama, a annoncé jeudi son intention de renoncer à son rôle politique, estimant que le temps était venu de laisser sa place à un nouveau dirigeant «librement élu».

Le dalaï-lama avait déjà maintes fois évoqué son retrait de la fonction de chef du gouvernement tibétain en exil, rôle principalement officiel, sans pour autant abandonner son rôle spirituel.

Il a annoncé jeudi qu'il déposerait un amendement en ce sens lors de la session du Parlement tibétain la semaine prochaine.

«Mon désir de transmettre l'autorité n'a rien à voir avec une volonté de renoncer aux responsabilités», a-t-il déclaré.

«C'est pour le bien à long terme des Tibétains. Ce n'est pas parce que je me sens découragé», a assuré le prix Nobel de la paix lors d'un discours à Dharamsala, dans le nord de l'Inde où sont basés les Tibétains en exil.

Le dalaï-lama, aujourd'hui âgé de 75 ans, avait seulement 15 ans lorsqu'il fut nommé «chef d'État» en 1950 après l'arrivée des troupes communistes chinoises au Tibet. Il s'enfuit de Chine en 1959 pour se réfugier à Dharamsala après l'échec d'un soulèvement contre l'administration de Pékin.

«Dès les années 1960, je n'ai eu de cesse de répéter que les Tibétains avaient besoin d'un dirigeant, élu librement par le peuple tibétain, à qui je pourrai transmettre le pouvoir», a-t-il déclaré. «Aujourd'hui, j'ai clairement atteint le moment pour mettre ceci en application», a-t-il ajouté.

Les Tibétains en exil ont élu directement un dirigeant politique pour la première fois en 2001.

Un porte-parole du dalaï-lama avait déjà annoncé en novembre dernier son intention de quitter sa fonction de chef du gouvernement tibétain en exil pour alléger sa charge de travail.

Adulé par son peuple, icône en Occident, il incarne aux yeux du monde entier la lutte des Tibétains contre l'administration chinoise au Tibet et les valeurs bouddhistes.

Lors de son discours jeudi marquant l'anniversaire du soulèvement de 1959, le dalaï-lama a toutefois assuré qu'il ne se retirait pas de la lutte politique et restait «engagé à jouer son rôle pour la juste cause du Tibet».

En dépit de son âge et de plusieurs alertes de santé, il continue de voyager dans le monde entier pour faire valoir la lutte du peuple tibétain. Il a déclaré jeudi avoir reçu des appels «répétés et sincères» du Tibet mais aussi d'ailleurs pour lui demander de conserver son rôle politique.

Abhorré par Pékin qui voit en lui un dangereux séparatiste, ce moine au sourire légendaire assure défendre une stratégie conciliante face à la Chine, une «voie moyenne» qui prône une simple «autonomie culturelle».

L'hypothèse de sa mort fait craindre au Tibet et au dehors un affaiblissement de la cohérence du mouvement tibétain, qui milite pour l'indépendance ou l'autonomie de cette région bouddhiste contrôlée par Pékin.

Traditionnellement, la recherche d'un nouveau dalaï-lama est menée par les lamas les plus haut placés dans la hiérarchie, mais le régime communiste chinois a récemment indiqué qu'il se réservait le droit d'avoir le dernier mot.

Plus haut rang du bouddhisme tibétain, le dalaï-lama est considéré comme la réincarnation du premier dalaï-lama né en 1391.