La virulente sortie du numéro deux d'Al-Qaeda, Ayman Zawahiri, contre Barack Obama démontre la peur qu'inspire le président désigné des États-Unis au sein du réseau terroriste, selon un spécialiste de l'islam radical.

Dans un message audio diffusé hier sur l'internet, l'adjoint d'Oussama ben Laden a traité le premier Noir à accéder à la Maison-Blanche d'« esclave » au service des Blancs et dénoncé sa promesse d'envoyer des renforts américains en Afghanistan.

«L'élection de Barack Obama terrorise Al-Qaeda», a commenté Fawaz Gerges, chef du département d'études moyen-orientales au collège Sarah Lawrence à New York et auteur de deux livres sur le djihadisme, dont Journey of the Jihadist : Inside Muslim Militancy.

«Barack Obama représente le pire cauchemar de ben Laden», a ajouté l'universitaire d'origine libanaise au cours d'une entrevue téléphonique. «Sa rhétorique et son symbolisme changent les règles du jeu. Il délégitime ben Laden et Al-Qaeda aux yeux des Arabes et des musulmans.»

Il s'agissait de la première intervention publique d'Ayman Zawahiri depuis l'élection de Barack Obama à la présidence. Le numéro deux d'Al-Qaeda a emprunté à Malcom X, le militant musulman noir américain assassiné en 1965, l'expression « esclaves noirs domestiques » pour parler non seulement du président désigné mais également des deux derniers secrétaires d'État américains, Colin Powell et Condoleezza Rice.

«Ce que Malcom X disait au sujet des esclaves noirs employés de maison s'applique à vous et à des gens comme vous», a dit Zawahiri dans un enregistrement intitulé «le départ de Bush et l'arrivée d'Obama».

«Vous représentez l'opposé de Noirs américains comme Malcom X», a-t-il ajouté.

L'enregistrement est accompagné de photos de Zawahiri, de Malcom X et de Barack Obama priant au mur des Lamentations lors d'une visite en Israël cette année.

Et le numéro deux d'Al-Qaeda de commenter : «Vous avez choisi de rejoindre les rangs des ennemis des musulmans et de dire la prière des juifs, bien que vous affirmiez que votre mère était chrétienne.»

Selon Fawaz Gerges, le message de Zawahiri pourrait se retourner contre son auteur, même si plusieurs Arabes et musulmans ont commencé à déchanter à propos d'Obama.

«Il y a un grand enthousiasme chez les Arabes et les musulmans au sujet de Barack Obama», dit le chercheur, qui a effectué des séjours fréquents au Moyen-Orient au cours des 18 derniers mois. «Mais cet enthousiasme a diminué au cours des six ou sept derniers mois parce que Barack Obama est perçu de plus en plus comme un politicien centriste, un politicien américain ordinaire.

«Cela dit, plusieurs des personnes que j'ai interviewées au Moyen-Orient sont critiques de Zawahiri. On lui reproche de ne rien réaliser de concret à l'exception de ses vidéos. Il se peut donc que les gens disent : attendons avant de juger Barack Obama ; il n'est même pas encore au pouvoir.»

L'équipe de transition du président désigné a fait savoir hier que celui-ci ne réagirait pas publiquement aux propos insultants de Zawahiri. La veille de la diffusion de son message, Obama avait téléphoné au président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, lui promettant de continuer à oeuvrer pour faire progresser le processus de paix.