Dans une des décisions les plus importantes de sa présidence, Barack Obama donnera le feu vert à l'envoi de renforts militaires en Afghanistan, où ceux-ci seront concentrés dans les 10 zones les plus peuplées du pays, à commencer par Kandahar, la capitale spirituelle des talibans.

Dans le reste de l'Afghanistan, les forces américaines feront appel à des drones de reconnaissance et à des informateurs locaux pour cibler leurs attaques contre les insurgés talibans et leurs alliés.

 

La nouvelle stratégie américaine, dont les grandes lignes ont été dévoilées hier dans le New York Times, se veut un mélange des propositions formulées par le général américain Stanley McChrystal - commandant en chef des troupes alliées en Afghanistan - et par le vice-président Joseph Biden.

Le général avait réclamé l'envoi de 40 000 soldats supplémentaires en Afghanistan pour combattre les talibans et empêcher Al-Qaeda de reprendre pied dans le pays. Selon le Times, il disposera d'au moins quatre nouvelles brigades de combat, soit environ 18 000 soldats supplémentaires.

Deux de ces brigades devraient être déployées dans le sud du pays, dont une à Kandahar. Une troisième serait envoyée dans l'est et une quatrième serait utilisée partout dans le pays, selon les besoins.

Le vice-président Biden, de son côté, s'était opposé à un renforcement massif des effectifs américains en Afghanistan. Il proposait plutôt de restreindre la mission des forces américaines en concentrant les attaques sur Al-Qaeda et les talibans le long de la frontière pakistanaise.

La solution hybride choisie par le président Obama a été décrite ainsi par un responsable gouvernemental cité par le New York Times: «McChrystal pour la ville, Biden pour la campagne». Il s'agit d'une reconnaissance implicite que les États-Unis ne peuvent venir à bout de l'insurrection dans l'ensemble de l'Afghanistan.

«À la place, l'objectif serait d'empêcher Al-Qaeda de revenir en force, tout en maîtrisant et en affaiblissant les talibans suffisamment longtemps afin de bâtir des forces de sécurité afghanes qui pourraient à terme reprendre la mission», a résumé le Times.

Spécialiste des questions militaires à l'Université McGill, Desmond Morton réagit avec «un peu de scepticisme» à la nouvelle stratégie américaine. Il craint que les renforts militaires envisagés ne soient pas suffisants pour accomplir la mission qui leur sera confiée, tout particulièrement dans la province de Kandahar, où le Canada compte environ 2000 militaires.

«On donne au général McChrystal une excuse pour perdre le combat», a-t-il déclaré lors d'un entretien téléphonique en faisant allusion au refus du président d'envoyer 40 000 soldats supplémentaires en Afghanistan. «Le message que l'administration Obama envoie aux soldats sur le terrain, c'est qu'elle n'est pas tellement sérieuse.»

Le chef de la Maison-Blanche devrait finaliser le réexamen de sa stratégie afghane demain à l'occasion d'une rencontre avec les chefs d'état-major interarmées. Il pourrait faire l'annonce officielle de sa nouvelle approche avant sa tournée en Asie le mois prochain. Il quittera Washington le 11 novembre pour une tournée qui le conduira à Singapour, en Chine, en Corée du Sud et au Japon.