La politique musclée que mène le gouvernement français envers les Roms suscite un véritable malaise dans l'Église catholique. À tel point qu'un prêtre dit même avoir prié pour que le président Nicolas Sarkozy soit foudroyé par la maladie.

«Je prie - je vous demande pardon - pour que M. Sarkozy ait une crise cardiaque», a déclaré dimanche le père Arthur Hervet, un prêtre de Lille très investi dans la défense des minorités.

«J'en suis là. Je sais que je n'ai pas le droit de le faire, mais je dis: «Seigneur, il n'y a plus que toi qui puisses arrêter quelque chose»», a déclaré le religieux, qui a présenté des excuses quelques heures plus tard.

«Je ne veux absolument pas la mort du président Sarkozy. Mon seul désir: que Dieu frappe son coeur comme il l'a fait pour Saul sur le chemin de Damas. Saul s'est relevé et est devenu témoin de la Vie», a expliqué l'homme de 71 ans, qui a rendu sa médaille de l'Ordre du mérite pour manifester son indignation face à la politique gouvernementale.

Hier, le prêtre a ajouté qu'il souhaitait que le président vienne constater les difficiles conditions de vie des Roms.

L'archevêque de Lille, Mgr Laurent Ulrich, a déclaré dans un communiqué qu'il ne pouvait «cautionner» les propos du prêtre, tout en se montrant plus que compréhensif face à son exaspération.

La situation «que vivent actuellement les Roms provoque la conscience de nombreux chrétiens et d'hommes de bonne volonté», a-t-il souligné.

Sortie du pape

L'archevêque d'Aix-en-Provence, Mgr Christophe Dufour, a aussi critiqué la politique gouvernementale dans les derniers jours après avoir assisté au démantèlement d'un campement illégal.

«Les discours sécuritaires qui laissent entendre qu'il y a des populations inférieures sont inacceptables. Ces personnes, citoyens européens, vivent pour la plupart paisiblement ici», a-t-il souligné.

Le pape Benoît XVI, dans une sortie que la presse nationale a interprétée comme une remontrance envers le gouvernement français, a déclaré de son côté à des pèlerins français qu'il faut «accueillir les hommes de toutes origines».

Le secrétaire du Conseil pontifical pour les migrants et les gens du voyage, Agostino Marchetto, avait déclaré quelques jours plus tôt que «les expulsions en masse de Roms» sont contraires aux normes européennes.

Le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, prenant la mesure du tollé dans l'Église catholique, a déclaré hier matin qu'il était disposé à rencontre le président de la conférence épiscopale, le cardinal André Vingt-Trois, pour discuter de la situation.

Pas question de mea-culpa pour autant de la part du politicien, qui accuse le «petit milieu médiatico-parisien» d'entretenir la polémique par des «mots extrêmement forts».

Un froid avec les catholiques

Le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, a insisté sur l'importance de préserver la séparation «totale de l'Église et de l'État» pour inciter le milieu ecclésiastique à freiner ses critiques.

Qu'elle soit juste ou pas, la politique sécuritaire du gouvernement est en train de créer un sérieux froid avec les catholiques de France, prévient Jean-Pierre Denis, responsable de l'hebdomadaire catholique La Vie.

«Le démocrate-chrétien n'aime ni l'éclat du bling-bling, ni les sirènes hurlantes des derniers jours, indique le journaliste. Le discours martial sécuritaire n'est pas vraiment fait pour le conservateur tempéré.»